Plus d’un jeune sur deux est assigné à résidence

Territoires
08 avril 2019

DÉCRYPTAGE. Se rendre au tra- vail, faire ses courses, rejoindre son école... ces déplacements du quo- tidien ne sont pas accessibles à tous les jeunes. Face à ce constat inquié- tant, la « commission insertion » du Conseil d’orientation des politiques de jeunesse a planché des mois durant. Résultats: 37 préconisations pour sortir les jeunes de l’isolement. 

La mobilité est-elle une des clés de l’émancipation, un levier vers l’autonomie des jeunes ? C’est à cette question que la « commission insertion » du Conseil d’orientation des politiques de jeunesse, mandatée par le ministre de l’Éducation nationale, a souhaité répondre. L’objectif de ces travaux pilotés par Sandrine Charnoz et Léa Pierret est de proposer des solutions concrètes aux freins à la mobilité pour que les jeunes acquièrent autonomie et indépendance. Sans surprise, ce sont les mobilités géographiques qui représentent la partie la plus dense du rapport, car les enjeux sont de tailles : les freins aux déplacements sont si nombreux qu’ils entravent le quotidien des jeunes en les éloignant des lieux de formation (écoles, universités...) et du marché de l’em-loi. « Et dans un contexte où les parcours sont de plus en plus marqués par une alternance des situations dans l’emploi, il est urgent d’apporter à la jeunesse, et notamment aux plus fragiles, des solutions pragmatiques », explique Valérie Dreyfuss, déléguée générale du Laboratoire de mobilité inclusive (LMI). Et il y a urgence. Les études et les sondages menés auprès des jeunes, quant à leur capacité à se déplacer, dressent un bilan inquiétant. Déjà, en 2016, dans son enquête « Mobilité et accès à l’emploi », le LMI tirait la sonnette d’alarme : « 73 % des 18-25 ans jugeaient alors qu’ils pourraient répondre à plus d’offres d’emploi s’ils pouvaient se déplacer, alors que 41 % d’entre eux déclaraient avoir refusé un emploi ou une formation faute de moyens de transport pour s’y rendre. »

LES PLUS FRAGILES ASSIGNÉS À RÉSIDENCE
Car des territoires entiers sont devenus, à bien des égards, de véritables déserts, où les populations se heurtent à une assignation à résidence. « Un piège dangereux, car, on le sait, l’ancrage géographique restreint drastiquement le champ des études et des orientations professionnelles, et l’accès aux services de la vie quotidienne », avertit Valérie Dreyfuss. En matière d’accès à la formation, ce sont les jeunes bacheliers d’origine défavorisée qui sont les moins mobiles : c’est le constat de l’étude de l’Insee publié en janvier 2019 (Première n° 1727 de janvier 2019) « Sur les mobilités géographiques des nouveaux bacheliers pour la poursuite de leurs études ». Il est précisé que« quand les jeunes d’origine défavorisée résident loin des grands pôles universitaires, des contraintes financières plus fortes sont susceptibles de peser sur les choix, soit en matière de cursus accessibles à proximité, soit à l’extrême, en conduisant l’étudiant à renoncer à poursuivre ses études supérieures ».

DES CAUSES MULTIPLES QUI S’ADDITIONNENT
Au-delà de l’inégale dis- tribution des moyens de transport, le Comité identi- fie d’autres causes parfois profondes. En premier lieu, les frontières invisibles. En effet, le déplacement d’un territoire vers un autre, aussi proche soient-ils, est, pour bon nombre de jeunes, une telle source d’angoisse et d’appréhension, qu’ils préfèrent y renoncer. « Car parvenir à les franchir demande des compétences qui ne sont pas innées et qu’il est nécessaire d’acquérir au terme d’un parcours formatif et éducatif », préconise Valérie Dreyfuss. Même constat pour le permis de conduire. « Il faut prendre en compte que pour les jeunes ne maîtrisant pas les compétences de base, l’épreuve du code de la route est un réel frein à l’obtention du permis de conduire. Car les compétences à développer sont d’ordres multiples »,expliquent les rapporteurs. L’une des difficultés soulevées par les formateurs réside dans l’articulation entre les savoirs référentiels liés au code de la route et les compétences de base requises : linguistiques, mathématiques, maîtrise de l’orientation dans le temps et l’espace, raisonnement logique. Autre frein à lever, le coût des transports: pour les jeunes de 18-30 ans, les dépenses liées au transport représentent 17,8 % de leur budget total. « Un coût beaucoup trop lourd pour les plus défavorisés qui les éloigne du marché du travail, mais également des activités au quotidien. » En effet six jeunes sur dix interrogés par l’Institut Elabe pour le LMI sur le thème « La Mobilité au quotidien » déclarent avoir renoncé aux activités sociales en raison des coûts liées aux déplacements.Pourtant, l’isolement n’est pas une fatalité. « Après six mois de réunions régulières, nos travaux ont abouti à 37 préconisations pour améliorer la mobilité des jeunes organisées autour de cinq thématiques : agir pour et avec les jeunes, les mobilités sociales, les mobilités géographiques, les mobilités résidentielles et enfin les mobilités internationales », explique Valérie Dreyfuss. « Nos préconisations englobent un champ large et traitent autant de l’accompagnement, de dispositifs innovants, d’apprentissage et d’éducation, ou encore de solutions financières. Si la mobilité est reconnue comme un levier d’épanouissement, il faut alors envisager d’aider les jeunes à acquérir leur autonomie », concluent Sandrine Charnoz et Léa Pierret.

Danièle Licata

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Question :
Un maire, donc OPJ, peut-il l’être en dehors de sa commune ?
Réponses :
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Tous les pouvoirs du Maire en tant que représentant de l'Etat ne lui sont octroyés que sur son territoire.
Non uniquement dans la commune où il est élu maire.

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