TENDANCE. Avec l’Opération de revitalisation de territoire (ORT), la loi ELAN revisite la régulation des implantations commerciales. Explication avec Me Marc Zimmer, avocat au cabinet Jeantet & Associés.
RCL : Qu’est-ce qu’une Opération de revitalisation de territoire (ORT) ?
Marc Zimmer : L’ORT est un outil créé par la loi ELAN du 23 novembre 2018 à disposition des collectivités locales pour porter et mettre en oeuvre un projet de territoire dans les domaines urbain, économique et social, pour lutter prioritairement contre la dévitalisation des centres-ville.
Comment se présente l’ORT ?
M. Z. : L’ORT se matérialise par une convention signée entre l’intercommunalité, sa ville principale, d’autres communes membres volontaires, l’État et ses établissements publics. Toute personne publique ou privée susceptible d’apporter son soutien ou de prendre part à des opérations prévues par le contrat peut également le signer – à la condition que cette adhésion ne soit pas susceptible de la mettre ultérieurement en situation de conflit d’intérêts. Une ORT est portée conjointement par l’intercommunalité et sa ville principale.
Quels sont ses avantages ?
M. Z. : Les avantages sont nombreux. D’abord, elle permet de renforcer l’attractivité commerciale en centre-ville grâce à la mise en place d’une dispense d’autorisation d’exploitation commerciale et la possibilité de suspension au cas par cas de projets commerciaux périphériques. Mais également de favoriser la réhabilitation de l’habitat par l’accès prioritaire aux aides de l’Anah [Agence nationale de l’habitat, NDLR] et l’éligibilité au Denormandie dans l’ancien (dispositif fiscal voté dans la loi de finances 2019), et de faciliter les projets à travers des dispositifs expérimentaux comme le permis d’innover ou le permis d’aménager multisite. Sans compter que cette loi va permettre de mieux maîtriser le foncier, notamment par le renforcement du droit de préemption urbain et du droit de préemption dans les locaux artisanaux, de lutter contre la vacance des logements et des locaux commerciaux et artisanaux, ainsi que contre l’habitation indigne. Enfin cette opération va permettre de réhabiliter l’immobilier de loisir, de valoriser le patrimoine bâti et de réhabiliter les friches urbaines.
Comment se compose une convention ORT ?
M. Z. : Une convention ORT est un document contractuel susceptible de modification par voie d’avenant dans lequel on doit trouver les éléments suivants : la durée, une période minimale de cinq ans est recommandée ; le secteur d’intervention comprenant obligatoirement le centre de la ville principale ; le contenu et le calendrier des actions prévues, sachant qu’une ORT comprend nécessairement des actions d’amélioration de l’habitat ; les conditions de délégation des actions à des opérateurs. Le plan de financement des actions prévues et leur répartition dans des secteurs d’intervention délimités ; le comité de pilotage local associant l’ensemble des partenaires publics et privés concernés.
Quels sont les territoires concernés ?
M. Z. : L’ORT s’adresse à tout territoire qui souhaite engager un projet de revitalisation. Les 222 territoires du programme national Action coeur de ville pourront très rapidement transformer leur convention existante déjà signée en convention ORT. La mise en place de l’ORT sera également facilitée pour les 53 communes lauréates de l’AMI [Appel à manifestation d’intérêt] centre-bourg, les villes bénéficiant du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) et du programme national de requalification des quartiers anciens dégradés (PNRQAD). Les préfets, services et opérateurs de l’État sont mobilisés pour accompagner les collectivités dans leur démarche.
Sur quelle base est-elle signée ?
M. Z. : La stratégie est élaborée à partir d’un diagnostic des besoins, des potentiels et des atouts du territoire, dans une approche multisectorielle et transversale (Circulaire du 4 février 2019 NOR : LOGL1905862J).
Qui contacter ?
M. Z. : Le préfet de département ou de région.
RCL : Quelles sont les étapes à suivre ?
M. Z. : Il faut d’abord définir un projet de revitalisation du territoire et les parties prenantes de l’ORT, préciser le contenu de la convention (durée, secteurs d’intervention, calendrier, financements et gouvernance), faire délibérer l’intercommunalité, la ville principale, voire les autres communes volontaires. Ensuite, vous pouvez signer la convention d’ORT avec l’ensemble des partenaires, puis la publier. Il faut aussi veiller à la publication administrative dès l’adoption de la convention. Enfin, un bilan annuel et une évaluation tous les cinq ans des actions entreprises, et leurs incidences financières, sont présentés aux conseils municipaux et à l’organe délibérant de l’EPCI signataires de la convention.
Quel est le processus d’élaboration dans le cas de communes n’ayant pas bénéficié du programme Action coeur de ville ?
M. Z. : La convention d’ORT est un document simple qui s’adapte à la forme souhaitée par le comité local de l’ORT en fonction du projet. Il n’existe pas de modèle type.
Quel rôle joue le ministère de la Cohésion des territoires ?
M. Z. : Dans une circulaire du 4 février 2019 relative à l’accompagnement par l’État des projets d’aménagement des territoires NOR : LOGL1905862J (texte non paru au JO), la ministre de la Cohésion des territoires et des relations avec les collectivités s’est adressée aux préfets de régions et de départements pour accélérer et faciliter l’ORT, engager le dialogue avec les collectivités et appuyer les projets de revitalisation de leur territoire. Pour y répondre, et après évaluation des besoins en lien avec les collectivités, elle invite les préfets à organiser localement l’appui technique des services de l’État et des établissements publics pour définir l’organisation de projet la plus efficiente au cas par cas. Comme prévu dans la circulaire, « la création d’une ORT doit être facilitée par un dispositif souple, lisible et opérationnel afin de faire bénéficier des effets juridiques de l’ORT l’ensemble des collectivités qui veulent conduire un projet de territoire et qui auront délibéré à cet effet ».
Propos recueillis par Danièle Licata
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