Le mouvement de végétalisation des cours de récréation prend de l’ampleur en France. En ville comme à la campagne, de nombreux maires ont profité des vacances d’été pour requalifier ces espaces bitumés peu accueillants. L’objectif ? Lutter contre les effets du changement climatique et surtout redonner à l’enfant des espaces propices à son épanouissement.
Après requalification, les cours d’école rénovées proposent généralement des espaces plus naturels, davantage de végétation, une meilleure gestion de l’eau de pluie, des points d’eau ainsi que des aménagements ludiques pour les enfants. À Rouen, la municipalité a engagé un ambitieux programme qui devrait permettre jusqu’à 60 % de déminéralisation pour certaines cours d’école, la plantation de plus d’une cinquantaine d’arbres ainsi que la création de nombreux espaces verts et de zones de fraîcheurs, d’ombrage et de biodiversité. « Les cours des écoles jouent un rôle considérable dans le réchauffement climatique : ces sites asphaltés à outrance participent massivement à l’effet d’îlot de chaleur urbain. C’est pourquoi la ville a engagé dès l’été 2021 un programme de déminéralisation et de végétalisation des cours d’école », explique Nicolas Mayer-Rossignol, maire de Rouen et président de la Métropole Rouen Normandie. La ville de Montrouge qui a fait de la végétalisation et de la lutte contre les îlots de chaleur une priorité vient d’achever les aménagements d’une première cour d’école pour offrir aux enseignants et aux enfants un cadre de vie plus naturel et surtout des espaces rafraîchis et plus agréables à vivre. « Des zones d’infiltration au cœur de la cour et un système de pente orienté vers les espaces plantés ont été réalisés, l’en- robé noir a été remplacé par un enrobé drainant de couleur claire tandis que la surface d’espaces verts sera agrandie de 41 % » précise la municipalité. Ces cours réaménagées communément appelées « cours
Oasis » ont pris naissance à Paris en 2017 avec l’adoption de la stratégie résilience de la ville de Paris. Le document définit un certain nombre d’actions à mettre en place pour que la capitale puisse faire face
aux bouleversements climatiques. L’une des actions préconisées vise à rafraîchir les écoles afin de créer des îlots de fraîcheur dans la ville qui deviendraient des refuges pour les habitants en cas de fortes chaleurs.
PARIS, PIONNIÈRE DE LA TRANSFORMATION DES COURS
Trois premières écoles pilotes ont été transformées à l’été 2018 puis rapidement, la ville de Paris se fixe un objectif ambitieux : transformer l’ensemble des cours d’école et de collèges de la capitale. Les interventions consistent à mieux répartir les espaces, rafraîchir, désimperméabiliser, végétaliser, favoriser les matériaux naturels, réintroduire l’eau, créer des zones d’ombre et aussi rendre les espaces plus ludiques pour les enfants. « Nous essayons de désimperméabiliser au maximum les sols tout en veillant à conserver des surfaces permettant la pratique du sport ; nous préconisons la végétalisation en pleine terre pour favoriser l’infiltration des eaux de pluie, la plantation d’arbres ou encore l’installation de pergolas et auvents pour apporter de l’ombre, explique Charlotte Van Doesburg, cheffe de projet « cours Oasis » au CAUE 75 qui a accompagné la ville de Paris dans la transformation d’une quarantaine de cours d’école parisiennes. Pour l’aspect ludique, les travaux portent davantage sur les usages avec l’aménagement de zones calmes équipées de tables, chaises, gradins où les enfants pourront s’allonger, lire, jouer aux cartes. Et parce qu’ils aiment aussi grimper et prendre des risques, les sur- faces autrefois planes laissent place à des parcours accidentés qui « aident à travailler la motricité » selon les spécialistes. Mais l’originalité du projet réside dans l’approche choisie : les enfants sont acteurs du projet. « C’est un moyen de les sensibiliser au changement climatique et à la biodiversité. Nous formalisons avec eux le projet à travers des ateliers qui rassemblent également l’équipe pédagogique, la direction et les agents de service pour définir un projet satisfaisant pour tout le monde », poursuit la cheffe de projet. L’autre rôle du CAUE 75, plus transversal, consiste à former à la fois les enseignants et le personnel de la ville de Paris aux enjeux de la démarche et accompagner les services techniques, maîtres d’œuvre de ces projets de trans- formation et chargés de la rédaction du cahier des charges technique.
UN PROJET QUI FAIT DES ÉMULES
L’expérience parisienne contribue à la diffusion des « cours oasis » partout en France où les collectivités se réapproprient le sujet, chacune à sa manière. « Avec ses deux amphithéâtres de verdure, sa cuve enterrée de récupération des eaux de pluie utilisées pour l’arrosage, son long préau lumineux, son hôtel à insectes, son point d’eau, ses cabanes, composteurs, poubelles de tri et ses garages à vélo et à trottinette donnant sur le parc Saint-Gilles, cette cour est un témoignage supplémentaire de la ville durable que nous construisions ensemble », tweetait le 4 juillet Patrice Vergriete, maire de Dunkerque à propos de la première école de la ville récemment amé-nagée. Prochaine étape en 2023 avec l’accueil de poules grâce aux « Jardicocottes » de l’association locale La Fa- brique Verte. À Nice, les élèves de l’école Ariane Sud-Marcel Pagnol, première cour nouvelle génération de la ville, profitent désormais de 390 m2 de pelouse en lieu et place du béton, d’arbres fruitiers, d’un potager agrandi et de zones ombragées. La municipalité a prévu de consacrer trois millions d’euros au verdissement des cours d’école entre 2021 à 2026. Dans le cadre d’une stratégie d’adaptation au changement climatique, la ville de Lille lançait en 2018 un vaste son plan de végétalisation de ses 79 cours d’école, selon le procédé suivant de répartition : un tiers dédié aux surfaces végétalisées, un tiers dédié aux surfaces perméables et un tiers pour les sols imperméables pour les activités, avec un processus d’élaboration qui consiste, dans l’année qui précède la végétalisation de la cour d’école, à travailler le projet avec les enfants et les enseignants. « C’est un projet global qui vise notamment un objectif de cour d’école actrice de la transition écologique, qui sert une appropriation par les enfants de leur espace de jeu tout en prenant en compte leur parole pour travailler avec eux sur le climat », affirme Charlotte Brun, adjointe à la maire de Lille en charge de la végétalisation des cours d’école. Aujourd’hui, la municipalité va encore plus loin en visant la désimperméabilisation de 100 % des surfaces des cours d’école. Pour Charlotte Van Doesburg du CAUE 75, le bilan est largement positif : « Les équipes pédagogiques rapportent que les enfants seraient plus calmes pendant les récréations et rentrent en classe plus posés, aptes à recevoir les apprentissages ».
Blandine Klaas
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