Les édifices religieux s'offrent une seconde vie

Territoires
04 juillet 2019

Nombre d’édifices religieux ont perdu leur vocation cultuelle. En cause, une baisse drastique de la fréquentation, avec, pour conséquence, des bâtiments inutilisés et laissés à l’abandon. Pour éviter leur destruction, certains responsables locaux se mobilisent pour sauver ce patrimoine culturel local, quitte à envisager sa reconversion.

Rouen réinvente son patrimoine. » C’est l’intitulé de l’appel à projets de la ville de Rouen (76) pour la vente de quatre sites patrimoniaux remarquables, autrefois dédiés au culte et aujourd’hui désaffectés. La ville souhaite leur donner un nouvel avenir et renforcer l’attractivité des quartiers dans lesquels ils sont implantés. Cette pratique pourrait devenir courante dans les années qui viennent, compte tenu du riche patrimoine religieux français – plus de 42000 églises et chapelles – de la baisse de la fréquentation des lieux de culte par les fidèles et, enfin, de la difficulté que rencontrent les communes à entretenir régulièrement ces édifices.
La ville de Tourcoing (59) a sauté le pas, en 2011, en cédant pour 20000 € à un compagnon-couvreur très motivé l’église Saint-Louis, édifice néo-roman érigé en 1894, désaffecté en 2009, et menacé de démolition. Ce sont désormais des habitants et des visiteurs attirés par les programmations culturelles qui franchissent le seuil de l’église, transformée en lieu convivial et ouvert. Concerts, cours de danse, expositions, rencontres, café culturel et chambres d’hôtes, le concept séduit. Une réussite selon Peter Maenhout, adjoint au maire en charge du Patrimoine :« C’est un projet qui rayonne bien au-delà de la ville. Ce lieu qui accueille un public métropolitain dynamise le quartier dans lequel il est implanté. »

UN PATRIMOINE À CONSERVER
En matière de reconversion, pas question de faire ce que l’on veut. « L’église touche toujours à la part intime des gens puisqu’elle rappelle une première communion, un mariage ou l’enterrement d’un aïeul », d’où la nécessité de déterminer un cahier des charges précisant les conditions de cession du bâtiment. À Granville (50), la prescription principale pour l’église Saint-Paul, fermée depuis bientôt deux décennies, porte sur la construction, ou plutôt sur une éventuelle déconstruction. « Nous ne souhaitions pas que l’église soit déconstruite en totalité ; nous acceptons éventuellement une déconstruction partielle, à condition que le bâtiment conserve sa silhouette », précise Dominique Baudry, la maire de la ville qui a fait le choix de ne plus investir dans cet édifice, redevenu simple bâtiment communal depuis sa désacralisation, et dont le coût de réhabilitation a été évalué entre 5 et 7 M€.
Après réflexion, un appel à manifestation d’intérêt est lancé avec cession du bâtiment sous la forme d’un bail emphytéotique. En clair, la ville reste propriétaire du bâtiment, mais se décharge de ses obligations qui incombent à l’occupant. À savoir le paiement de la taxe foncière, la réhabilitation de l’édifice et son entretien régulier. « Dans ce genre de dispositif, c’est nous qui fixons la durée du bail, quarante à cinquante ans dans le cas présent ; nous avons la possibilité d’in- clure des clauses nous permettant de sortir du dispositif si besoin », précise la maire. Dernière condition à laquelle le futur gestionnaire devra se conformer: seul un projet à caractère patrimonial, sociétal et économiquement viable sera accepté.

ENVISAGER DE NOUVEAUX USAGES
Nombreuses sont les communes qui, faute de pouvoir investir pour leur entretien, cèdent leurs édifices religieux, espérant leur donner la possibilité de répondre à de nouveaux usages. Tout en soulageant leurs finances. Une idée que semble accepter une majorité de Français comme le montre cette étude intitulée Les Français et le patrimoine de proximité, publiée en 2016, réalisée pour le compte de la Caisse d’Épargne et la Fondation du patrimoine: 71 % des interviewés de confession catholique se déclaraient favorables à la réhabi- litation des églises non entretenues en bâtiments civils. Avec une préférence pour les bibliothèques, les salles d’exposition, les musées ou encore les salles de concert.
C’est une bonne nouvelle compte tenu des chiffres publiés par l’Observatoire du patrimoine religieux (OPR), qui œuvre en France à la préservation du patrimoine religieux. L’inventaire réalisé, en 2017, recense 5000 édifices nécessitant des travaux d’entretien, et 500 églises seraient directement menacées.
Le devenir des églises interroge. Plusieurs territoires se sont emparés de cette réflexion, conscients que le phénomène risque de s’accentuer avec le temps. Ainsi, plusieurs actions ont été lancées sur le territoire de la communauté de communes Mad & Moselle (54) et notamment un diagnostic des églises, ainsi qu’une démarche de concertation des paroissiens et des habitants. Ce processus devrait aboutir à la mise en œuvre de véritables stratégies de reconversion.
Chacun possède son avis sur la finalité des lieux, mais la majorité s’accorde sur un point : la reconversion permet de préserver un patrimoine d’exception. À l’heure de l’économie circulaire et de la lutte contre l’étalement urbain, il serait opportun de s’interroger sur les nouveaux usages que pourraient accueillir ces bâtiments qui souvent constituent le point de repère d’un quartier ou d’une commune.

 

UN PATRIMOINE CULTUEL EN PÉRIL
• La France compte au total 42258 églises et chapelles paroissiales, auxquelles s’ajoutent les chapelles de particuliers, d’hôpitaux, de châteaux, les abbatiales...
• 500 églises seraient menacées de destruction ou d’effondrement, faute d’entretien.
• La toiture et les maçonneries des bâtiments sont à reprendre tous les soixante-dix à cent ans.
• Paris compte 530 édifices religieux, dont 96 appartiennent à la mairie.

Blandine Klaas

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Question :
Un maire, donc OPJ, peut-il l’être en dehors de sa commune ?
Réponses :
Non, il est élu OPJ sur sa commune.
Tous les pouvoirs du Maire en tant que représentant de l'Etat ne lui sont octroyés que sur son territoire.
Non uniquement dans la commune où il est élu maire.

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