L’accès aux services d’infrastructure de base comme l’eau, l’assainissement, l’énergie, les transports ou encore les télécommunications est le garant de l’activité économique d’un territoire et contribue au bien-être des populations en répondant aux besoins fondamentaux. La bonne gestion et la conservation de ces infrastructures constituent un défi auquel les collectivités territoriales doivent faire face. À travers la notion de résilience, c’est une démarche collective, globale et prospective qui s’impose à elles.
Dans sa stratégie de résilience adoptée en 2017, une démarche qui propose de transformer la capitale et de la rendre plus résistante face aux chocs, la ville de Paris s’est engagée à adapter son fonctionnement mais aussi ses infrastructures. Pour définir ce plan, elle s’est notamment appuyée sur le réseau « 100 Résilient Cities », une initiative de la Fondation Rockefeller pour accompagner les villes confrontées à une multiplication des menaces, tout en favorisant le partage d’expériences, les bonnes pratiques et les solutions. Pour Sébastien Maire, qui a collaboré à l’élaboration et à la mise en oeuvre de la stratégie de résilience de Paris de 2015 à 2019, aujourd’hui délégué de France Ville Durable « chaque infrastructure, doit être pensée dans ses interactions avec les autres, de manière transversale. C’est toute la puissance de cette approche : la résilience ne coûte pas plus cher, elle vise au contraire à répondre à davantage de besoins, et produire davantage de bénéfices, avec les mêmes budgets ». La résilience urbaine et plus encore celle de nos infrastructures est un sujet de plus en plus présent dans les préoccupations des collectivités. De quoi parle-t-on au juste ? Selon la définition du GIEC, reprise par l’Arctic Council en 2016, la résilience se définit comme la capacité d’un système social, économique ou écologique à faire face à une perturbation, une tendance ou un événement dangereux en réagissant, en se réorganisant de manière à conserver sa fonction essentielle, son identité sa structure tout en gardant ses facultés d’adaptation, d’apprentissage et ou de transformation. « Dans le cas des infrastructures, qui desservent un territoire et permettent la libre circulation des biens des services et des personnes, c’est bien la fonctionnalité que l’on va chercher à préserver plus que l’infrastructure elle-même, la résilience des infrastructures n’a d’intérêt que lorsqu’elle se met au service de la résilience d’un territoire, estime Fabien Palhol, directeur de la recherche et de l’innovation et référent résilience au Cerema. S’il existe différentes façons d’appréhender la résilience, il est difficile de considérer comme résiliente une infrastructure qui ne soit pas adaptée à certaines évolutions qu’elles soient technique, sociétale, démographique ou environnementale et qui entraînent un changement dans les pratiques. Un exemple récent : la progression du télétravail a changé les pratiques d’utilisation des infrastructures de transport. Il est essentiel de penser l’infrastructure et son adaptation au regard des besoins et des évolutions des territoires. C’est à la fois un travail de définition de périmètre, d’adaptation aux enjeux d’un territoire mais aussi un travail de prospective. »
PROSPECTIVE ET STRATÉGIE
« La résilience c’est avant tout un concept sur-mesure », poursuit fabien Falhol. Repenser les infrastructures urbaines pour mieux anticiper les risques qui menacent, se préparer aux crises futures et les éviter. Adapter ces infrastructures à nos modes de vie. Préparer les villes à l’avenir en les amenant à adopter une démarche prospective et stratégique. Envisager la réversibilité et l’évolutivité des usages, anticiper de futurs usages et transformations encore inconnus. C’est aussi de cela dont il s’agit. « La résilience des infrastructures va bien plus loin que la résistance physique aux aléas. Elle peut prendre plusieurs formes. La gestion différenciée des infrastructures peut constituer un levier de résilience, tout comme profiter de la redondance d’infrastructures identiques. Savoir qu’une route dans dix ans ne sera plus praticable et décider de ne plus la financer, c’est une stratégie de résilience parce que les budgets seront investis à d’autres fi ns beaucoup plus utiles. La résilience en termes de choix techniques, de solutions et de stratégie, c’est aussi adopter des solutions dégradées, des solutions avec retour au statu quo et des solutions avec amélioration. »
DES OUTILS AU SERVICE DES COLLECTIVITÉS
Les collectivités commencent tout juste à s’approprier le concept. Mais la démarche dans sa dimension opérationnelle reste encore à inventer. Pour accompagner les territoires, le Cerema a conçu la « boussole de la résilience » une aide pour les collectivités, qui prennent chaque jour la mesure des défi s à relever. Conçue comme un cadre d’action, elle est organisée selon six leviers(*), déclinés en 18 principes d’action, pour renforcer les capacités des territoires à se préparer à une crise, à réagir et s’adapter en cas de perturbation, et à rebondir. « Cette méthodologie est applicable à tous les territoires, c’est une méthodologie que n’importe qui peut prendre en main également pour n’importe quel type de réseau ou d’infrastructure ». La boussole affi rme l’importance de la transformation comme principe clé d’une approche nécessairement globale et transversale. « Pour que les villes deviennent plus résilientes, il faudrait qu’elles aient une bonne connaissance de leurs actifs afin que l’on puisse en projeter le risque. Il faut pour cela pouvoir mesurer, historiser et digitaliser au travers de solutions métiers », estime Yann Genet, directeur du développement européen de la gestion prédictive et de l’optimisation durable de la performance des actifs immobiliers et des infrastructures. Il pense que les collectivités locales sont peu ou mal préparées et encore peu outillés. Pour les aider à maîtriser les risques, Oxand digitalise les processus de décision, valorise les données utiles de ses clients et accompagne les gestionnaires à passer d’une approche corrective au prédictif. C’est ainsi que le conseil départemental des Côtes d’Armor a pu répondre à deux enjeux : le premier sur la programmation pluriannuelle des investissements dynamique sur les ouvrages ; le deuxième sur la construction d’une méthodologie de priorisation des actions à risques. Avec la solution de gestion prédictive Infrasim, le territoire riche de plus de 1 800 ouvrages particulièrement diversifi és a pu réaliser l’inventaire des ouvrages et en évaluer le vieillissement. « Capitaliser sur la donnée permet à l’organisation de ne plus être dans la réaction par rapport à un incident mais de pouvoir anticiper. La résilience ne concerne pas uniquement l’infrastructure, elle est aussi dans les bonnes pratiques mises en place pour s’adapter à un événement, qui une fois subi puis renseigné dans un système, verra sa gestion facilitée s’il devait survenir à nouveau. C’est ce qui les rend résilients ».
Blandine Klaas
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