Célia Vérot (Fondation du patrimoine) : "Nous agissons tel un facilitateur de développement de projets"

Territoires
27 octobre 2022

Valoriser l’engagement des élus locaux et les aider à financer leurs projets patrimoniaux, qu’il s’agisse d’une église, d’un lavoir, d’un théâtre ou d’un château, c’est la mission de la Fondation du patrimoine qui depuis vingt-six ans contribue ainsi à l’embellissement tout comme au développement économique des communes en France. Entretien avec sa directrice générale, Célia Vérot.

RCL : En quoi votre organisation intéresse-t-elle les élus ?

Célia Vérot : La Fondation s’intéresse en particulier au patrimoine rural local, sous-investi en termes de subventions, et qui avec le temps se dégrade. Notre métier consiste à apporter une aide aux élus mais aussi aux propriétaires privés tant en termes de financement de projets patrimoniaux que d’accompagnement de leurs démarches, grâce à notre réseau de 850 bénévoles présent sur l’ensemble du territoire, dans nos antennes régionales et départementales. À ce jour, nous avons travaillé dans plus de 18 000 communes pour aider au financement de plus de 35000 projets patrimoniaux.

De quelle manière les projets sont-ils financés?

C.V. : S’il existe des aides et subventions pour aider les élus à financer leurs pro- jets de restauration du patrimoine, le cœur du réacteur c’est bien la collecte de dons. Car en mobilisant la population et les entreprises locales pour recueillir leur mécénat, il se crée un véritable mouvement d’adhésion aux projets. Deux à trois mille projets de collectivités sont en cours chaque année auxquels il faut ajouter ceux des particuliers qui contribuent eux aussi à embellir l’espace urbain. Depuis cinq ans, nous bénéficions d’une source nouvelle de financement : le loto du patrimoine. Ce dispositif très médiatisé agit tel un accélérateur de projets et permet d’apporter des aides plus importantes.

Quels sont les enjeux de la restauration du patrimoine ?

C.V. : Avec l’incendie survenu à la cathédrale Notre-Dame de Paris en avril 2019, nous avons appris qu’il y avait un enjeu de prévention et d’entretien préalable de notre patrimoine qui permet de diminuer les coûts de la rénovation. Chacun sait qu’un actif entretenu dure plus long- temps. Chacun sait aussi que plus un bâtiment est utilisé, mieux il est entretenu et plus il sera durable. L’un des grands défis pour demain sera à la fois de diffuser les bonnes pratiques et trouver des financements pour l’entretien du patrimoine. Il nous faudra également démontrer l’apport positif de la rénovation du bâti ancien en réponse à des objectifs de transition écologique, avec le réemploi des matériaux existants et la réutilisation des emprises de sol.

Le patrimoine n’est pas qu’une affaire de beauté mais aussi d’utilité. La Fondation du patrimoine attribue désormais une aide financière à des projets pour leur impact positif sur leur territoire...

C.V. : Pour la troisième année consécutive, nous attribuons dans le cadre du « fonds Impact » une dotation d’environ 200 000 euros à des projets dont nous évaluons les impacts positifs socio-économiques sur le territoire. Une démarche encore rare dans le monde de la générosité où pourtant les mécènes doivent rendre compte de l’utilisation qu’ils font de l’argent qui leur est confié. Il est avéré que le mécénat et la collecte de dons créent de l’engagement citoyen ainsi qu’une dynamique participative qui stimulent la mobilisation des financeurs publics et privés. Quant aux dépenses injectées dans l’économie lo- cale pour les travaux, elles contribuent à générer des retombées économiques immédiates et durables selon un effet multiplicateur : 1 euro apporté par la Fondation du patrimoine en faveur d’un projet de restauration du patrimoine permet de générer 21 euros de retombées économiques. Parmi les projets primés en 2022, citons l’ancien groupe scolaire Monanges à Clermont-Ferrand (63) qui va désormais accueillir des adultes handicapés en mixité avec des jeunes étudiants ; l’éco-rénovation des anciennes mines de Pont-Péan (35), une friche industrielle désaffectée au cœur de l’une des plus grandes fermes so- laires de Bretagne qui permettra d’y développer des activités culturelles ou encore la restauration du fort de la Justice à Belfort, un bâtiment du XIXe siècle en péril. Plus nous aurons de références de rénovations réussies, plus nous serons en mesure de convaincre de nouveaux mécènes.

La Fondation du patrimoine a lancé le Portail du patrimoine. Que peuvent y trouver les acteurs publics ?
C.V. :
La mise en service du Portail correspond au troisième volet d’un partenariat conclu, en juillet 2021, entre le ministère de la Culture, le ministère de la Cohésion des territoires et la Fondation du patrimoine. Avec cet outil, la Fondation du patrimoine souhaite apporter une réponse aux élus et aux acteurs publics. Le Portail fournit un panorama de la réglementation et des aides existantes françaises mais aussi européennes, des conseils pour identifier les interlocuteurs adéquats, des exemples de projets réussis, un accès aux ressources utiles disponibles sur Internet. L’objectif étant de les orienter vers les bons interlocuteurs. Ils y trouveront également des conseils pour l’animation de collectes de dons, car le succès d’une opération en dépend.

Les technologies numériques ont-elles joué un rôle dans la préservation du patrimoine ?
C.V. :
Le numérique est un facilitateur et nous en avons l’expérience avec les collectes de dons que nous déclinons sur le portail numérique mais aussi sur les réseaux sociaux, des vecteurs très importants pour aller chercher de nouvelles audiences et faire connaître la Fondation du patrimoine. La prévention passe elle aussi par le numérique. Des technologies très abouties permettent aux experts de modéliser un bâtiment en 3D et donc de faciliter sa restauration et sa reconstruction comme ce fut le cas pour la cathédrale Notre-Dame de Paris. L’ensemble de la chaîne de la prévention de la construction, de la restauration du patrimoine pourrait être facilitée grâce aux outils numériques.

Quels conseils donnez-vous aux élus qui souhaitent engager un projet de rénovation de leur patrimoine ?
C.V. :
Restaurer le patrimoine c’est bien mais il faut avant tout réfléchir à l’usage que l’on souhaite lui donner pour le faire vivre, pour que les habitants se l’approprient. À la Fondation du patrimoine, nous sommes convaincus qu’il s’agit là d’un levier de développement économique local très bénéfique pour la population d’un point de vue économique mais aussi en vue de cohésion sociale territoriale. Dans ce contexte de tensions sociales fortes dans notre société, le patrimoine peut agir comme un levier fédérateur et de cohésion.

Propos recueillis par Blandine Klaas 

 

LES FRANÇAIS ET LE PATRIMOINE

  • 86% se disent « attachés à leur patrimoine local ».
  • 31% ont déjà fait un don pour la conservation du patrimoine.
  • 68% considèrent que les villages et centres-bourgs ne sont pas suffisamment valorisés.
  • 72% considèrent que le patrimoine industriel n’est pas suffisamment valorisé.

(Sondage réalisé par BVA pour la Presse régionale – 2019)

  • 74% visitent des sites patrimoniaux tous les ans.

(Sondage OpinionWay pour la Fondation du Patrimoine – 2018)

www.portailpatrimoine.fr

Paroles de maires

RCL
Question :
Un maire, donc OPJ, peut-il l’être en dehors de sa commune ?
Réponses :
Non, il est élu OPJ sur sa commune.
Tous les pouvoirs du Maire en tant que représentant de l'Etat ne lui sont octroyés que sur son territoire.
Non uniquement dans la commune où il est élu maire.

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