Un collectif de 200 élus, chercheurs et entrepreneurs, sous l’impulsion de Jean-Christophe Fromantin, maire de Neuilly-sur-Seine (92) demande aux candidats d’accélérer le développement des villes moyennes pour les amener au standard des grandes villes. Explications.
Les villes moyennes, le nouvel eldorado des Français ? Le collectif d’élus, d’entrepreneurs et d’universitaires mobilisé depuis quelques mois sur les enjeux des villes moyennes en est persuadé. Longtemps délaissées au profit des métropoles, elles redorent leur blason. Selon l’étude Kantar pour la Fabrique de la Cité (Les Français et les villes moyennes, novembre 2020), huit Français sur dix souhaitent renouer avec une qualité de vie plus apaisée, retrouver de l’espace et se rapprocher de la nature. Un rêve que beaucoup souhaitent même se voir réaliser rapidement. Preuve, Cadre Emploi vient de publier une étude annuelle révélant que le nombre de Franciliens recherchant un emploi en régions a augmenté de 31 % entre mars 2020 et mars 2021. Autrement dit, un cadre sur cinq de la région parisienne cherche à s’installer ailleurs. Dix départements sont plébiscités : la Gironde, la Loire-Atlantique, le Rhône, les Bouches-du-Rhône, le Nord, l’Ille-et-Vilaine, la Haute-Garonne, l’Aveyron, les Alpes-Maritimes et l’Oise. « Cette appétence participe d’une attractivité nouvelle des territoires. Et les villes moyennes occupent une place majeure dans ce mouvement. Au-delà d’offrir la configuration urbaine favorite des Français, elles peuvent former une solide armature pour accueillir et distribuer équitablement les équipements et services publics indispensables à la vie quotidienne », garantit Jean-Christophe Fromantin, maire de Neuilly-sur-Seine (92) à la tête du collectif « villesmoyennes.org » et auteur de « Travailler là où nous voulons vivre : Vers une géographie du progrès » (Éditions Les Pérégrines).
DES VILLES MOYENNES AU STANDARD DES GRANDES VILLES
Car selon les Français interrogés, ces communes allient les avantages des grandes villes (commerces, services publics...) et des petites villes (proximité de la nature). Et les régions ont un rôle stratégique à jouer pour amener les villes moyennes au standard des grandes villes, garantit le coordonnateur du collectif. « Car les régions sont des aménageurs et possèdent toutes les compétences de développement et de mobilité. Il nous semblait que la perspective des régionales était le moment de lancer cet appel », explique le maire de Neuilly. Xavier Bertrand, président des Hauts-de- France et signataire de l’appel, enfonce le clou : « 10 % de la population a envie de vivre autrement, et plutôt dans les villes moyennes. La responsabilité des régions, dans les années qui viennent, est de permettre d’amplifier le mouvement. On n’y parviendra que si on crée des emplois, des infrastructures et des services publics. » Hervé Morin, président de la région Normandie et lui aussi signataire du collectif, lui emboîte le pas : « Les régions ont un rôle stratégique dans la construction de cette armature. Parce que nous portons un projet global pour le développement de notre territoire et nous sommes ainsi les mieux placés pour définir les lignes de développement, mais aussi parce que nous avons les compétences et les moyens de développer cette armature. » Il y a trois logiques à cet appel au soutien des régions : la première, c’est le maillage homogène et cohérent qu’offrent les villes moyennes. « En France, nous avons cet héritage géographique très diversifié. Les villes moyennes, qui étaient des bourgs, épousent très bien la topographie du pays. Donc chaque région doit avoir un regard stratégique sur leurs villes moyennes pour assurer l’équité d’accès au service public », précise Jean-Christophe Fromantin.
Le deuxième axe d’actions est la redistribution des services. « Reprenons la nomenclature Insee sur les services dans les grandes villes (une gamme de 188 services dans des domaines comme le commerce, l’enseignement, la santé ou les transports] et mettons les villes moyennes aux standards des services des grandes villes d’aujourd’hui », poursuit le coordonnateur du collectif. Enfin, interpeller l’État sur la symétrie des dispositifs déjà existants, « aujourd’hui, quand on construit un campus d’industrie, ou un campus connecté, on construit sans convergence avec les autres politiques, ce qui déroute les acteurs publics et privés. On investit dans tel hôpital et la SNCF nous dit : ‘‘On supprime la gare !’’. Où est la cohérence ? C’est le défaut aujourd’hui des politiques publiques : chacun fait la sienne mais il n’y a pas de vision globale et stratégique de l’État sur le développement des territoires. »
50 PROPOSITIONS POUR PLUS D’ÉQUITÉ SUR LE TERRITOIRE
Au-delà de l’alerte lancée au gouvernement de stopper les dispositifs à géométrie variable et donc de l’urgence à faire converger les politiques publiques, le collectif « villesmoyennes.org » formule 50 propositions dans les domaines de l’éducation, de la santé, de la culture, du développement économique et de l’emploi (cf les 50 propositions : villes-moyennes. org). Et parmi les nombreuses pistes, certaines comme sur la culture ou l’université, proposent que les grandes villes partagent leurs moyens avec les villes moyennes. « Est-ce que le vrai combat de la métropole, c’est d’être seulement une grande ville ou que sa centralité rejaillisse sur les territoires ? L’équilibre du pays passe par la complémentarité et si on ne redéploie pas nos économies dans les territoires, on va épuiser nos avantages comparatifs et on va tout droit vers une économie standardisée. Or, il y a urgence. Nos parts de marché qui s’écroulent de 30 % par rapport à nos voisins de la zone euro, selon une étude récente de Rexecode », avertit l’édile de Neuilly.
Danièle Licata
LES 10 ORIENTATIONS DU COLLECTIF
Stabiliser l’armature culturelle, économique et sociale de la France autour de 300 villes moyennes.
Mettre chaque zone rurale à moins de 20 min d’une ville moyenne et chaque ville moyenne à moins de 1h30 d’une métropole régionale.
Assurer une lisibilité des grandes politiques publiques et encourager les investissements privés en faisant des villes moyennes des hubs de services publics.
Développer l’expérimentation énergétique et l’innovation écologique dans les villes moyennes.
Développer un concept « d’écoles d’éveil » et promouvoir un label dans les villes moyennes autour de leurs propres atouts patrimoniaux. Développer le programme « Campus connecté ».
Développer des bases logistiques autour des villes moyennes.
Renforcer les tiers-lieux (coworking) en développant leurs équipements technologiques.
Accélérer la diffusion de la fibre optique sur l’ensemble du territoire et développer les « verticales » 5G dans les villes moyennes.
Créer de puissants leviers de financement en circuits-courts par l’épargne de proximité.
Lancer un dispositif d’ingénierie culturelle accessible par les villes moyennes.
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