Centres de vaccination : les élus souhaitent que l’Etat prenne part au financement

A l’initiative de Michèle TABAROT, députée des Alpes-Maritimes et conseillère municipale du Cannet, des maires et élus locaux cosignent une lettre-ouverte au Président de la République pour demander à l’État de prendre réellement sa part au financement des centres de vaccination.

« Sans l’aide des collectivités locales, vous auriez perdu la bataille contre la Covid-19. C’est un fait. Alors que l’État s’est trop souvent montré dépassé par les événements, les communes, départements et régions ont prouvé leur efficacité en trouvant des réponses face à toutes les urgences, mais à quel prix ! » affirment les cosignataires, des élus qui accueillent sur leur commune un centre de vaccination et déplorent au passage que « le leitmotiv du «quoi qu’il en coûte» ne s’applique pas aux collectivités locales ». La participation de l’État au financement des centres de vaccination est en effet dérisoire, selon les élus, « avec parfois plus de 90 % des dépenses qui restent à la charge des collectivités ». Depuis le début de la crise les communes ont trouvé des réponses à toutes les urgences, pour fournir des moyens de protection à la population et aux professionnels face à la pénurie, puis pour développer les dépistages et enfin en créant des centres de vaccination en mobilisant leurs agents et leurs moyens.  Sans elles, la stratégie nationale aurait été un échec. Elles ont suppléé l’État à chaque étape sans que les aides ne soient jamais à la hauteur. Une situation que ces élus estiment « injuste et illégitime » et demandent à l’Etat « d’apporter des aides enfin à la hauteur pour financer les centres de vaccination ». Pour Michèle TABAROT : «De nombreux élus se sont immédiatement joints à la démarche et les signatures se poursuivent. Les communes ont montré une réactivité à toute épreuve et ont créé des centres de vaccination dès le mois de janvier alors que l’État n’avait rien anticipé. La Santé relève pourtant de sa compétence.Il est juste et légitime qu’il prenne véritablement sa part à l’effort engagé par les collectivités locales dans la lutte contre la pandémie.»

La lettre ouverte compte plus de 50 signataires parmi lesquels les maires de Saint-Étienne, Metz, Évreux, Biarritz, Asnières, Hyères, Paris-Centre, Drancy, Puteaux, Saint-Jean-de-Luz, Les Herbiers, Pornic, Manosque, Le Touquet-paris-Plage, Bourg-la-Reine, Mions, Sisteron, Grasse, Chateaudun, Aubenas…

Vaccination des agents : le cumul des complexités

Prévue par la loi 2021-1040 du 5 août 2021, la vaccination de certains agents contre la Covid-19 constitue un redoutable défi organisationnel, procédural et pédagogique pour les collectivités publiques. Mais, déjà, en maîtriser les arcanes juridiques n’est pas une mince affaire. Par Eric Landot, avocat.

  1. QUI ?

Doivent être vaccinés, en résumé :

Un débat pourrait avoir lieu, non sur la médecine universitaire, visée par cette nouvelle obligation, mais sur la médecine scolaire. La vaccination ne s’applique pas aux personnes ayant des tâches ponctuelles dans les locaux correspondants, mais là encore le sujet reste fort discuté. Elle ne s’applique pas non plus aux opérateurs funéraires selon l’Etat, sans que cette vision souple soit à l’abri de risques contentieux.

 

 Délicate petite enfance…

Le débat s’est beaucoup cristallisé sur les personnels des structures propres à la petite enfance. L’Etat pose désormais que « ne sont pas concernés par l’obligation vaccinale les professionnels de crèche, d’établissements ou de services de soutien à la parentalité ou d’établissements et services de protection de l’enfance. »

Mais cette position ne tient pas pour ceux de ces établissements sis dans des établissements de santé ni pour les « auxiliaires de puériculture » qui sont des professionnels de santé et qui à ce titre doivent être vaccinés.

 

  1. QUAND ? 

 

A partir du 9 août jusqu’au 14 septembre 2021 inclus, les agents concernés doivent, à défaut d’être vaccinés, présenter a minima un justificatif de résultat négatif d’un examen de dépistage virologique de moins de 72 heures .

Du 15 septembre au 15 octobre 2021 inclus, une tolérance est appliquée pour les agents et personnes ayant un schéma vaccinal partiel (au moins une dose pour un schéma vaccinal à plusieurs doses), et qui peuvent présenter un justificatif de résultat négatif d’un examen de dépistage virologique de moins de 72 heures.

A compter du 16 octobre 2021, tous doivent présenter le justificatif d’un schéma vaccinal complet.

La loi créée une autorisation d’absence permettant de se faire vacciner, sans que ces absences n’emportent d’effets sur leur rémunération, leur droit à congés ou au calcul de leur ancienneté.

  

III. ET POUR CEUX QUI NE PEUVENT ÊTRE VACCINÉS ?

 

Le décret n° 2021-1059 du 7 août 2021 prévoit la situation des personnes ne pouvant pas être vaccinés, avec une liste de pathologies justifiant une absence de vaccination (avec contre-indication médicale remise à la personne concernée qui le transmet à l’assurance maladie).

 

  1. AVEC QUELLES SANCTIONS ? 

 

Un régime de suspension (sans rémunération) est prévu par la loi pour ceux qui n’ont pas procédé à cette vaccination. Cette procédure est à distinguer des suspensions disciplinaires.

L’employeur qui ne procède pas à la mise en place de ce régime risque, quant à lui, des sanctions pénales.

 

 

Coût de la crise sanitaire pour les communes d’Ile-de-France : l’AMIF poursuit son enquête

L’Association des maires d’Ile-de-France (AMIF) a présenté mercredi 30 juin 2021, à l’occasion de la 25e édition de son salon annuel, les résultats de la seconde phase de l’étude sur les coûts de la Covid pour les communes franciliennes. Elle dévoile notamment les premiers coûts des centres de vaccination pour les communes d’Ile-de-France.

L’effort financier des communes aura des conséquences sur les années suivantes et fait craindre une baisse de leurs investissements dans le contexte de relance révèle cette étude réalisée par l’AMIF et ses partenaires La Banque Postale, le cabinet Partenaires Finances Locales et CBG Territoires. Globalement, les recettes de fonctionnement ont baissé de 1,1% pour les communes franciliennes du fait d’une perte de recette de 360 millions d’euros sur les produits de services et domaines en 2020 liés à la fermeture des services pendant les confinements et à des décisions de stationnement ou de droits de terrasses gratuits. Les communes de plus de 30 000 habitants ont perdu près du quart de leurs recettes d’occupation du domaine public par rapport à 2019.

Le coût élevé des centres de vaccination

Concernant le coût des centres de vaccination pour les communes, les dépenses en personnel sont les plus importantes : certaines communes ont eu à avancer le paiement du personnel médical ; concernant les ressources humaines, les communes et collectivités ont pu redéployer leurs agents du fait de la fermeture de services publics locaux mais doivent de plus en plus recruter. En termes de dépenses matérielles, l’achat d’équipement a représenté un coût moyen de 30 000 euros par centre. Des dépenses annexes se sont greffées à l’organisation de la vaccination : des prestations de nettoyage, de gardiennage ou encore de transport des habitants vers les centres. L’épargne brute des communes a globalement chuté en Ile-de-France. Si les petites communes ont pu voir leur épargne brute augmenter, elle a baissé de 4,8 % pour les communes de 10 000 à 29 999 habitants et de 7,4 % pour les communes de plus de 30 000 habitants. Enfin, l’investissement des communes a baissé de 16,4% par rapport à 2019 : 40% des communes interrogées ont déclaré avoir reporté ou abandonné des projets d’investissements en 2020. « Il ne faut donc pas négliger l’effort financier des communes d’Ile-de-France » estime l’AMIF, un effort financier qui risque d’être encore plus important en 2021 avec les protocoles sanitaires, la campagne de vaccination mais aussi les premières conséquences sociales de la crise. Pour l’association, « il est impératif que l’effort consenti par les communes soit compensé au mieux pour leur permettre de pérenniser leur engagement dans la campagne de vaccination, mais aussi plus largement dans toute autre action qui pourra permettre de lutter au plus près du terrain contre la Covid-19 et contre la crise économique et sociale qui pourrait s’aggraver ».

«Il nous faut donner de la simplicité et de la proximité à l'action publique pour retrouver le chemin de l'efficacité»

Pour André Accary, président du Département de Saône-et-Loire et vice-président de la commission « Solidarité et affaires sociales » de l'ADF, il aurait été illusoire d’envisager d’organiser efficacement une campagne de vaccination sans le concours des acteurs de terrain. Mais pour l’heure, l’urgence reste l’approvisionnement en vaccins. Et là, une fois de plus, les élus manquent de visibilité. Rencontre.

RCL : Quel regard portez-vous sur la stratégie vaccinale du gouvernement ?

André Accary : Tout avait pourtant si bien commencé. Pour mémoire, en octobre dernier, l’arrivée des vaccins en France se révélait être une nouvelle source de dysfonctionnement de l’action publique. J’ai alors adressé une lettre ouverte au Président de la République, Emmanuel Macron, lui signifiant qu'il était urgent de changer le pilotage de la campagne de vaccinations dans les territoires, en faisant confiance aux acteurs de terrain. Car il faut donner de la simplicité et de la proximité à l'action publique, pour retrouver le chemin de l'efficacité. Contre toute attente, nous avons été entendus et c’est ainsi qu’en quelques jours, des centres de vaccination se sont organisés autour du préfet, seule autorité compétente et régalienne dans cette nouvelle organisation. Mais pour se faire entendre, il aura fallu taper du poing sur la table. On voit à travers ce nouvel épisode, comment la crise de la Covid-19 agit comme un accélérateur de mutation, bouleversant profondément les paramètres économiques, sociaux qui régissaient la vie des collectivités et leur rapport avec l’Etat. C’est pourquoi, à l’ADF nous appelons à une nouvelle étape de décentralisation, car les grandes politiques publiques, lorsqu’elles sont conçues avec les collectivités locales et territoriales, elles portent leurs fruits. Notre connaissance des territoires, de leurs besoins et la mise en réseau des acteurs locaux sont essentielles pour intervenir de façon efficace, efficiente et réactive pour s’adapter à la diversité des territoires y compris dans les domaines du médico-social et hospitalier.

RCL : Mais force est de constater que la campagne de vaccination est interrompue…

AA : La mobilisation des acteurs a permis la mise en place d’une organisation optimale. Nous avons mis les centrales d’appel en activité, mais hélas, la mécanique n’a fonctionné que quelques jours. Aujourd’hui, les élus sont confrontés à des messages contradictoires qui alimentent leurs inquiétudes. On nous annonce l’accélération de la campagne alors que les rendez-vous sont ajournés faute de vaccins. Et les informations tombent sans lisibilité et sans visibilité. Pourtant, échaudés, nous avions questionné à maintes reprises les pouvoirs publics sur leur capacité à garantir la livraison de vaccins. Et chaque fois, la réponse était rassurante.

RCL : Avez-vous la volonté, comme pour les masques, de gérer l’approvisionnement de vaccins ?

AA : Non, tenter d’acheter des vaccins à l’échelle des collectivités est juste impossible. La commande de vaccins se fait à l’échelle européenne avec une répartition nationale. Il faut que chacun garde son sang-froid. L’approvisionnement est une affaire d’Etat, au risque de provoquer une surenchère financière. Et d’ailleurs, aucun Président de Département ne souhaite endosser cette responsabilité.

RCL : Cette organisation coûte chère aux départements ?

AA : Le coût n’a pas été encore évalué. Et l’heure n’est pas aux comptes car on ne sait pas combien de temps la crise sanitaire va durer. Mais on sait déjà que les conséquences sanitaires, économiques et sociales sont énormes. Il nous faut et faudra encore panser les plaies. Une chose est sure, le coût sera colossal pour nos territoires. Pour ce qui est de la campagne de vaccination, de nombreux maires de petites villes s’interrogent sur la prise en charge par les communes des frais de personnels, de location des salles accueillant un centre de vaccination ou des frais d’achat de petits matériels d’infirmerie. Car les petites villes de France ont des budgets contraints. Pour l’heure, nous naviguons tous à vue.

RCL : Qui supporte le coût ?

AA : Objectivement, en grande partie, les Départements. Nous avons déjà dépensé plusieurs dizaines de millions, et ce n’est pas fini. Les mesures sanitaires, confinement et couvre-feu, ont un impact extrêmement lourd sur l’activité économique des collectivités départementales. La pauvreté gagne du terrain et se traduit par une explosion du nombre d’inscrits au RSA. Sans compter les conséquences psychologiques qu’il ne faut pas négliger.

RCL : Quelles leçons tirer de cette crise inédite ?

AA : La crise sanitaire aura bouleversé la gestion des collectivités. Lorsque l’épidémie sera sous contrôle, il faudra alors accepter l’idée de remettre tous les logiciels à zéro pour réinventer un mode de gestion beaucoup plus simple, un mode de gestion de proximité. On voit bien les limites du millefeuille administratif, ce chevauchement d’institutions qui ralentit la bonne marche de nos actions sur le terrain. D’ailleurs, en recentrant les interlocuteurs de très grande proximité, Départements, communautés de communes, communes, autour du préfet, nous avons prouvé notre efficacité. Et en parallèle, les priorités des élus vont changer. Dans un premier temps on va devoir gérer les urgences économiques et sociales sans oublier de préparer l’avenir, mais avec une feuille de route différente. La proximité, qui permet de mieux écouter et de mieux réagir, sera l’épicentre de nos politiques, économiques, sociales, sanitaires, c’est déjà acté. Cette crise sanitaire va nous contraindre à privilégier les actes simples, au plus près des populations. Il nous faudra miser davantage sur l’humain pour être plus réactif. Pour l’heure, le gouvernement l’a bien compris. Et après ? Seul l’avenir nous le dira.

Propos recueillis par Danièle Licata