La métropole grenobloise réinvente son rapport à la montagne
Depuis qu’elle exploite la station du col de Porte et du Sappey-en-Chartreuse, la métropole met à profit ses nouvelles compétences touristique, sylvicole et agricole au service de ces espaces naturels située à 20 minutes de Grenoble.
En octobre 2021, la métropole s’est substituée au Sivom de Chamchaude, qui rassemblait la métropole et la ville de Saint-Pierre-de-Chartreuse (38), pour assurer la gestion et le développement du col de Porte (1324 m) à Sarcenas et du Sappey-en-Chartreuse (1014 m) et administrer en régie complète les activités présentes sur ces sites : des activités touristiques et de loisirs, agriculture, sylviculture et pastoralisme. « D’un point de vue organisationnel et financier, le Sivom sur la partie Domaine Nordique de Chamechaude, possédait des moyens plus restreints que la métropole. Celle- ci dispose d’une plus grande marge de manœuvre pour assurer leur développement que n’en avait le syndicat. De plus, la métropole a également pris des compétences sur les activités outdoor, le pastoralisme et la sylviculture. C’est un des plus grands domaines sylvicoles de France et d’une biodiversité très riche à préserver. Nous allons mettre toutes nos compétences au service de ce site d’exception et de l’ensemble des transitions que nous devons mener. » Quel sera demain le visage du domaine skiable grenoblois ? Comment développer, tout en le préservant, cet atout précieux pour la population et pour l’attractivité de la métropole ? D’ores et déjà des projets d’aménagements et d’espaces publics ont été lancés pour améliorer et sécuriser les conditions d’accueil du public : cheminements, parkings, mobilier public, aménagements paysagers).
CONCERTATION
Exit l’ère où chaque activité économique évoluait de façon verticale sans prendre en compte son environnement et les autres acteurs en présence. L’heure est à la transversalité et au dialogue entre toutes les forces et aspirations. Un comité de site réunissant une soixantaine de personnes – agriculteurs, exploitants, professionnels de l’activité touristique et de la filière bois, habitants... – réfléchit au futur de ce site d’exception. « Le but du premier comité de site qui s’est tenu en juin 2021 était de définir ensemble les valeurs du site ; il s’agissait de déterminer vers quoi nous voulions tendre d’ici à 2030, à quoi nous voudrions que le site ressemble. Pour mener tous ensemble cette réflexion, nous avons constitué des groupes de travail thématiques, explique Audrey Cosyns, chargée de mission pour le projet du col de Porte. L’objectif étant que tous les acteurs puissent avoir la parole et proposer des actions. » L’accueil du public, l’adaptation au changement climatique, la mobilité, les conflits d’usage, l’éducation des visiteurs sont autant de sujets identifiés qui seront débattus entre les acteurs et feront l’objet de propositions suivies d’un plan d’action. L’objectif selon Mélina Herenger, étant « de ramener ce site à ce qu’il est, un site de croisement de nombreux usages et de populations ». Un site de fierté territoriale propice aux activités en plein air en toutes saisons que les Grenoblois ont redécouvert pendant la crise sanitaire et dont la fréquentation ne cesse d’augmenter.
POPULATIONS « DU HAUT » ET « DU BAS »
Pour la métropole alpine, les transitions à mener constituent une opportunité pour dessiner un nouveau modèle d’attractivité, vecteur de cohésion sociale et territoriale. L’élue estime qu’il ne faut en aucun cas opposer la ville et la montagne, si proches, mais tisser un lien entre elles. Ne pas opposer non plus les populations « du haut » et celles « du bas ». « Dans les ambitions que nous portons, il y a cette volonté de solidarité d’un territoire urbain envers un territoire montagnard. Ce que nous souhaitons, c’est apporter la culture des usages d’un côté comme de l’autre. Les communes montagnardes de l’agglomération peuvent profiter de la richesse d’un bassin de vie comme celui qu’est Grenoble tandis que les métropolitains ont cette chance d’avoir ce site à proximité. Pour autant, il est nécessaire de les acculturer sur une meilleure compréhension de la biodiversité, de ne pas simplement voir ce site comme un espace de loisirs, mais comme un espace de vie tant sur le point de vue écologique que sur le point de vue économique. Les espaces et les usages doivent être respectés. » Le domaine du col de Porte abrite treize éleveurs ovins et bovins, une activité de pastoralisme avec laquelle les promeneurs doivent cohabiter harmonieusement. L’activité sylvicole historique constitue une ressource économique importante avec la forêt de Grande Chartreuse labellisée Forêt d’Exception, un label que détiennent seulement quinze forêts françaises. Le renouveau du col de Porte passera par une redéfinition des mobilités, elles seront douces et collectives promet l’élue qui veut en finir avec le stationnement sauvage. Il passera également par le développement d’activités en toutes saisons. Mais l’enjeu est social aussi, avec cette volonté que tous les habitants puissent profiter des bienfaits de la montagne qui « doit être accessible à tout âge et à toutes les populations et pas seulement aux catégories sociales les plus favorisées ». Des liens forts entre la ville et la montagne permettront d’envisager plus sereinement l’avenir du site.
LE COL DE PORTE : UN SITE RICHE EN ACTIVITÉS À PRÉSERVER
Activité sylvicole historique 25 emplois dans la filière, une ressource bois de qualité AOC, une forêt de Grande Chartreuse labellisée Forêt d’Exception reconfirmé en septembre 2021 (15 forêts labellisées en France).
Activité agricole-pastorale patrimoniale
13 éleveurs pour 140 bovins et 520 ovins en alpage l’été avec production de fromage sur l’alpage du Charmant Som.
Activités touristiques et de loisirs Premier téléski de France installé au col de Porte en 1932. Fort développement du ski nordique (stade de biathlon), site idéal pour l’apprentissage du ski avec près de 20 000 écoliers accueillis par an. Nombreuses autres activités : ski de randonnée, randonnée, VTT, trail, raquettes, luge, course d’orientation, etc.) et de nombreux emplois associés : hébergeurs, restaurateurs, prestataires divers avec des pluriactifs.
Depuis 1959, le site de mesure nivo-météorologique de Météo France au col de Porte collecte des mesures météorologiques et nivologiques. Il offre des données de référence mondiale sur l’évolution du climat et du couvert neigeux en montagne.
Blandine Klaas