La question du genre dans la cité ?
Avec la nomination d’une femme Première ministre, la question de la représentativité du genre dans la vie publique revient sur le devant de la scène. Nommer ou élire des femmes pour les exécutifs c’est bien, mais est-ce suffisant pour faire véritablement avancer le sujet de politique publique territoriale qui inclut la question du genre dans la manière de façonner leur espace public ? Par Marie-Céline Terré, spécialiste de la communication des institutions publiques et des territoires.
En mai 2006, était promue La charte européenne pour l’égalité entre les femmes et les hommes dans la vie locale ; déclinant autour de 30 articles les domaines d’actions des collectivités territoriales comme employeur, donneur d’ordre, prestataire de services et aménageur. Outre les questions de représentativité et de participation, pour lesquelles de nombreuses collectivités se sont engagées avec succès, il reste une sorte « d’impensé » s’agissant de la prise en compte du genre dans l’aménagement de ces mêmes territoires.
On ne parle pas de parité, mais d’accès mixte et égal aux espaces publics.
Il ne s’agit pas de construire des services publics spécifiques pour des catégories de population, femmes, personnes en situation de handicap..., car la prise en compte de la différenciation de genre introduirait une discrimination contraire au principe d’égalité. Défendre un égal accès aux services publics est formellement le cas, mais proposer de prendre en compte les spécificités du genre dans l’accès à ces mêmes services, c’est bien le sujet. Passer d’un droit formel à un droit réel.
Tout le monde peut aller à la piscine, mais celles qui ne disposent pas de véhicule thermique ou non personnel, mettront plus de temps pour s’y rendre et souvent y renonceront.
Penser dès la conception de ces services, à leur accès le plus « égalitaire possible », est le véritable enjeu, car on le sait, le biais se cache dans les détails.
Lorsqu’on scrute les aménagements publics récents de nombreuses collectivités, on peut légitimement se demander si elles ont mis en œuvre une approche véritablement non genrée dans leurs politiques de mobilité et d’usage de l’espace public.
Des aménagements accessibles facilement spécifiquement en transport individuel sont finalement « discriminants » pour les femmes qui sont plus nombreuses à ne pouvoir s’appuyer que sur les transports publics ou les réseaux familiaux/de proximité pour se déplacer. On voit bien que la mixité ne traduit pas, dans ce cas, l’égalité.
C’était, d’ailleurs, l’objectif des politiques menées dans les années quatre-vingt-dix par certaines villes, qui, si elles n’affichaient pas la question du genre en bandoulière, visaient bien à prendre en compte le principe de l’égal accès aux services de la ville, en intégrant les contraintes de temps et de moyens des catégories de populations les moins bien dotées.
L’objectif était un mieux-vivre et un mieux-être dans le territoire en permettant un accès plus facile à l’ensemble de ses aménités. C’est aujourd’hui un marqueur de l’attractivité des villes, qui se doivent d’être plus « faciles » à vivre.
Marie-Céline Terré