Les élus disent NON ! à la consigne des bouteilles plastiques

Non à la consigne des bouteilles plastiques ! clament en chœur dix associations d’élus locaux alors qu’une concertation nationale, lancée le 30 janvier dernier se poursuit. À trois mois de la décision finale prévue en juin, l’AMF, Intercommunalités de France, AMORCE, l’AMRF, l’ANPP, l’APVF, le Cercle National du Recyclage, Départements de France, France urbaine et Villes de France ont présenté des propositions alternatives à cette « fausse consigne » lors d’une conférence de presse organisée à Paris le 18 avril.

Le projet gouvernemental de mise en place d’une consigne sur les bouteilles plastiques a refait surface en début d’année après avoir été écarté de la loi Anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) en 2019, provocant la colère des associations d’élus qui rejettent en bloc la mesure proposée. De quoi s’agit-il au juste ? Les industriels de la boisson et de l’eau en bouteille se verraient bien mettre en place, à leur profit, un système de consigne sur les bouteilles plastiques. Ces entreprises s’appuyant sur des objectifs qui figurent dans la loi AGEC, visant à atteindre des seuils de recyclage de 77% en 2025 et 90% en 2029, expliquent les représentants des associations d’élus. Une mesure qui impacterait le pouvoir d’achat des Français par un surcoût d’environ 20 centimes d’euros sur toutes les bouteilles plastiques, sachant qu’ils ne récupéreraient leur mise que s’ils ramènent la bouteille usagée qu’il suffit actuellement de déposer dans le bac jaune, sans aucun surcoût. Quant à la facture des 30.000 à 100.000 automates nécessaires qu’il faudrait installer dans toute la France, elle est évaluée entre 750 millions et plus d’un milliard d’euros d’investissement, payés par les consommateurs. Et selon Daniel Cornalba, Maire de L'Étang-la-Ville (78) et vice-président de l’Association des petites villes de France (APVF), « ces machines de déconsignation seront probablement installées sur les parkings des centres commerciaux, donc un produit d’appel supplémentaire pour que les consommateurs aillent dans les supermarchés et se détournent de nos cœurs de villes». Les impacts de cette fausse consigne sont considérables expliquent en cœur les associations.

Une mesure qui ne permet pas de réduire les déchets

« Employer le mot consigne est une arnaque intellectuelle puisqu’il n’y a pas de réemploi. En réalité, il ne s’agit pas du tout d’un dispositif de consigne puisque les bouteilles plastiques déposées en consignes connaitront le même traitement qu’auparavant parce qu’il n’existe qu’une seule filière de recyclage» a expliqué Jean-François DEBAT, vice-président de l’association Villes de France qui déjà en février dernier avait dénoncé cette « fausse bonne idée pour l’écologie et pour les collectivités ». D’autant que ces bouteilles représentent moins de 1% des déchets des ménages, environ 8% des déchets plastiques. Pourquoi donc s’attaquer à un déchet qui ne représente que peu en matière de déchets et d’impact environnemental et qui de surcroit est le déchet plastique le mieux recyclé ?, s’interrogent les élus. « La bouteille plastique ne constitue pas le problème majeur puisqu’elle est déjà recyclée à 70% quand les autres déchets plastiques ne le sont qu’à 23%. Il faudrait commencer par d’autres types d’emballages et objets en plastiques » poursuit Jean-François Debat. Sans compter que la mesure envisagée par le gouvernement priverait les collectivités des seuls matériaux ayant une valeur permettant de réduire les coûts du service public de gestion des déchets au profit des contribuables. Enfin, les associations estiment que cette mesure ne ferait que compliquer le geste du tri par les ménages alors que l’extension des consignes de tri est appliquée depuis le 1er janvier 2023. Pour Josiane Corneloup, présidente de l’Association Nationale des Pôles territoriaux et des Pays (ANPP-Territoires de projet), « cette fausse consigne est tout simplement une aberration, elle va être aussi inefficace et coûteuse, elle n’a aucun sens dans la mesure où elle va perturber le geste de tri sélectif unique qui est en train de se mettre en œuvre ».

Les élus proposent des solutions alternatives

Dans un document commun, 14 propositions ont été formulées par les associations pour atteindre d’ici à 2029 un taux de 90% de collecte et de recyclage des bouteilles plastiques. Les élus se montrent notamment plus ambitieux en matière de réduction, de réemploi et de recyclage de tous les emballages ménagers, pour réduire massivement la pollution plastique et tous les déchets plastiques. Ils souhaitent également atteindre les principaux objectifs de la France en matière d’économie circulaire sur les déchets ménagers. Figurent parmi les propositions la volonté de mettre en place des actions concrètes pour respecter l’objectif français de division par deux des bouteilles plastiques d’ici 2030, permettre le geste du tri « partout, pour tous et tout le temps », rendre les objectifs plus ambitieux et plus contraignants pour les éco-organismes en matière de collecte sélective et de tri de tous les emballages plastiques, le renforcement de la régulation sur la mise sur le marché des emballages plastiques ou encore l’amélioration du cadre juridique et administratif de la tarification incitative, afin qu’elle devienne un véritable outil de réduction des déchets et en particulier des emballages ménagers.

« Il n'y aura pas de consigne sur les emballages en plastique » selon l’AMF

A l’occasion du102ème Congrès des maires et des présidents d’intercommunalité de France, le Président de la République et le Premier ministre se sont tous deux exprimé sur le sujet controversé de la consigne pour recyclage des bouteilles en plastique, qui fait l’objet d’une opposition unanime des associations d’élus depuis plusieurs mois. « Rien ne sera fait sans l’accord des maires » a annoncé mardi 19 novembre Emmanuel Macron, assurant vouloir conforter « ceux qui se sont organisés », « ceux qui ont pris de l’avance et ont investi ». Edouard Philippe, également présent sur le congrès des maires le jeudi 21 novembre, a reconnu pour sa part que le système de consigne utilisé dans d’autres pays européens « n’est pas le nôtre » et a répété « nous ne la mettrons pas en œuvre cette consigne, sans l’accord des associations d’élus. Parce que nous avons tout intérêt à avancer de concert plutôt qu’en opposition, en foisonnement et donc en désordre ». Le message est clair, selon l’AMF.

Collecte des déchets : pour l’APVF, le retour de la consigne pénalise les communes

Lors de la présentation le 10 juillet, en conseil des ministres, du projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, Brune Poirson, secrétaire d'Etat auprès du ministre de la Transition écologique et solaidaire a confirmé le déploiement d'un système de consigne. Une mesure que déplore l’association des petites villes de France (APVF), présidée par Christophe Bouillon, député de Seine-Maritime et maire honoraire de Canteleu, considérant que le retour de la consigne « va à l’encontre du système actuel de collecte et rend obsolète les investissements des collectivités pour le mettre en place ». L’association rappelle qu’elles ont déjà investi plus de 700 millions d’euros sur les 1,5 milliard prévus pour moderniser leurs centres de tri à l’horizon 2022 et des résultats, en termes de recyclage, seraient déjà visibles. L’APVF considère que la mise en place de la consigne constitue un retour en arrière au détriment des collectivités locales qui perdront une grande partie de leurs ressources, mais aussi des citoyens qui, à terme, verront la fiscalité augmenter. Et demande au gouvernement de renoncer à cette mesure.

Brune Poirson veut lancer la consigne des bouteilles plastiques

La secrétaire d’Etat à la Transition écologique, Brune Poirson, a réuni aujourd’hui à Strasbourg des élus, des ONG, des représentants des fabricants de produit afin de lancer un comité de pilotage qui aura vocation à explorer les conditions et les modalités de mise en œuvre de la consigne en France. Une première réunion très « constructive », selon la sécrétaire d’Etat, qui aura permis à chacun de partager son enthousiasme et parfois ses craintes. « J’ai réaffirmé l’ambition et la ligne rouge fixés par le Premier ministre pour cette concertation. La ligne rouge d’abord, aucune collectivité ne sera lésée. L’ambition ensuite, nous devrons atteindre 90% de collecte en 2029 quand nous ne collectons aujourd’hui même pas 6 bouteilles en plastique sur dix. Au travail ! » a-t-elle déclaré. Les premières conclusions sont attendues mi-septembre afin d’enrichir le débat parlementaire à venir sur le projet de loi anti-gaspillage pour une économie circulaire qui comprendra une disposition pour autoriser le principe de la consigne sur le territoire.