Encore des efforts à faire pour revaloriser les déchets du BTP

La valorisation des déchets du BTP est une obligation légale dont la pratique doit être généralisée à tous les projets de construction, sur l’ensemble du territoire dans le cadre de la protection de la planète. Reste que les pratiques de réemploi dans le secteur sont de l’ordre de l’expérimentation, s’inquiète l’Agence de la transition écologique (Ademe). Explications.

Souvenez-vous, alors secrétaire d’État à la Transition écologique, Brune Poirson lançait, le mercredi 5 février 2020, un appel à projets sur la gestion des déchets du bâtiment, à l’occasion d’un déplacement dans l’Aube. « On ne peut plus se contenter d’avoir seulement 2 % de toutes nos moquettes et de nos fenêtres recyclés ! Seule la moitié des déchets du bâtiment est recyclée et réutilisée, alors qu’il s’agit du secteur qui en produit le plus en France ». Le ton est donné. Cet appel à projets, doté de 20 millions d’euros, anticipe la création, début 2022, de la filière de responsabilité élargie des producteurs (REP) prévue par la loi sur l’économie circulaire, définitivement adoptée par le Parlement le 30 janvier dernier. « Il vise à recueillir des solutions pouvant être répliquées partout en France, avec quatre objectifs : réduire la production de déchets, augmenter le taux de recyclage et la part de déchets recyclés dans la construction, enfin promouvoir des solutions de massification autour de la technologie, de la traçabilité, des données techniques ou encore de la logistique », expliquait Brune Poirson lors d’un entretien qu’elle a accordé à RCL.

Le plan de relance présenté le 3 septembre 2020 par le Premier ministre Jean Castex alors que se tenait quelques jours auparavant les Assises de l’économie circulaire, enfonce le clou et prévoit une enveloppe globale supplémentaire de 500 millions d’euros accordée au fonds Économie circulaire de l’Agence de la transition écologique (Ademe) dont 5 millions d’euros pour mettre en oeuvre la traçabilité dans le cadre de la création de la filière de responsabilité élargie des producteurs pour les déchets du bâtiment. L’économie circulaire, et par là la gestion des déchets, devient donc une réalité dans le bâtiment. Et pour cause : les enjeux sont de taille. Le BTP produit à lui seul presque 228 millions de tonnes de déchets par an dont 42 millions de tonnes pour le seul secteur du bâtiment, selon l’Ademe.

PEUT-ON AMÉLIORER LE TAUX DE RECYCLAGE ?

La réglementation l’impose. Découlant d’une directive- cadre européenne de 2008, la loi sur la transition énergétique du 18 août 2015 contient en effet une série d’articles destinés à « lutter contre les gaspillages et promouvoir l’économie circulaire, de la conception des produits à leur recyclage ». Cette loi fixe notamment comme objectif de « valoriser sous forme de matière 70 % des déchets du secteur du bâtiment et des travaux publics en 2020 », par recyclage, réemploi ou remblaiement. En amont de la production de déchets, la loi porte aussi en filigrane de nouvelles exigences réglementaires sur la construction de bâtiments publics. Chaque fois que possible, ils devront être à énergie positive ou « à haute performance environnementale », ce qui pourra intégrer certains aspects de l’économie circulaire comme l’utilisation de matériaux recyclés.

MAIS AU-DELÀ DU CADRE JURIDIQUE, QU’EN EST-IL DANS LA RÉALITÉ ?

La loi sur l’économie circulaire en appelle clairement à la responsabilité de tous les acteurs du secteur du BTP, publics et privés qui sont contraints désormais de mieux gérer les déchets de leurs chantiers. Cette loi passe également par un changement de regard et de pratiques pour passer de la démolition à la déconstruction, des déchets aux ressources, en priorisant le réemploi, la réutilisation puis le recyclage. Un processus qui a un impact économique positif. En effet, assurer un tri des déchets sur le site même de l’opération permet de réaliser des gains tout à fait substantiels. En moyenne, une gestion efficace des déchets de chantier permet une réduction des coûts de l’ordre de 30 à 40 % selon l’Ademe.

DÉVELOPPER LES FILIÈRES DE RECYCLAGE

Reste que l’entrepreneur ne peut pas faire grand-chose si, en aval, les filières de recyclage ne suivent pas. Certaines sont déjà opérationnelles. C’est le cas de celles du plâtre et du bois recyclés en panneaux de particules ou réutilisés en combustible. Mais si les matériaux inertes comme le béton et les gravats sont largement réutilisés en sous-couche routière dans les travaux publics, dans le bâtiment en revanche, le recyclage du béton est encore rare. D’ailleurs, l’Ademe dans un rapport récent constate que les pratiques de réemploi dans le secteur du bâtiment sont encore de l’ordre de l’expérimentation notamment parce que les filières du réemploi sont peu connues. Pourtant, un bon nombre existe, mais elles ne sont pas toujours référencées en tant que telles.

DES FREINS ENCORE À LEVER

La valorisation des déchets est encore pénalisée par un certain nombre de freins. L’un des principaux concerne le maillage territorial insuffisant en points de collecte, principalement en régions rurales, ce qui limite l’accès aux gisements de déchets recyclables et donc empêche un traitement à grande échelle qui permettrait de faire baisser les coûts. Autres freins constatés : la traçabilité des déchets qui reste insuffisante pour assurer en aval la qualité des matériaux recyclés, la gestion des déchets mal prise en compte dans les marchés de travaux ou encore une compétitivité des filières de valorisation trop faible par rapport aux solutions traditionnelles d’enfouissement.

Danièle Licata

Urbanisme, construction, immobilier : une nouvelle ordonnance modifie des allongements de délais

Présentée mercredi 15 avril en Conseil des ministres, cette ordonnance vise « à modifier le texte du 25 mars 2020 dans un certain nombre de domaines et facilite l’activité à la fois des secteurs du BTP, de l’aménagement et de l’immobilier » précise un communiqué du ministère de la Cohésion des territoires. En effet, pour faire face à l'épidémie de covid-19, le Gouvernement avait pris fin mars plusieurs ordonnances pour permettre à notre pays de s’adapter à la situation exceptionnelle que nous connaissons, comme l’autorisait la loi d'urgence du 23 mars 2020. L’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 est ainsi venue proroger les délais échus ou impactés pendant la période d’urgence sanitaire. Concernant les secteurs de la construction et de l’immobilier, elle a notamment permis de préserver les droits acquis, et adapter les procédures administratives notamment en suspendant certains délais. Or, l’allongement de certains délais et procédures a pu dans certains cas induire des difficultés spécifiques susceptibles de freiner l’activité du secteur qui représente près de 11 % du PIB. «  Avec Jacqueline Gourault, nous avons veillé avec cette nouvelle ordonnance à apporter des réponses simples qui donnent de la visibilité aux acteurs et garantissent aussi que la reprise puisse se faire le plus rapidement possible, et de manière fluide, le moment venu » explique Julien Denormandie, ministre du Logement.

Les nouvelles dispositions

Dans les secteurs du BTP et de l’aménagement, l’ordonnance du 25 mars avait pour effet de retarder tous les projets de construction de trois mois après la période d’urgence sanitaire. Mais plus encore, dans le domaine de la construction, l’ensemble du processus (financements, actes notariés, chantiers) se trouve bloqué tant que les délais de recours contre l’autorisation de construire ne sont pas purgés. L’ordonnance du 15 avril prévoit ainsi que les délais de recours ne seront plus prorogés comme prévu par l’ordonnance du 25 mars mais suspendus. La période de suspension est par ailleurs réduite d’un mois. Ainsi, les délais de recours recommenceront à courir dès la fin de la période d’urgence sanitaire pour la seule durée qui restait à courir avant le 12 mars, ce délai ne pouvant cependant être inférieur à 7 jours pour sécuriser la saisine du juge administratif. Une disposition qui permet, selon le ministère de la cohésion des territoires, d’éviter tout risque de paralysie du secteur de la construction. La réduction d’un mois de la période de suspension s’applique également aux délais d’instruction des autorisations d’urbanisme qui recommenceront à courir dès la fin de l’urgence sanitaire. Ainsi les permis de construire pourront être délivrés plus tôt et les droits de préemption seront purgés plus rapidement. Concernant le secteur de l’immobilier, l’ordonnance précise que les délais de rétractation ou de réflexion ne sont pas suspendus. Cette disposition permet de ne pas bloquer la signature des ventes d et de permettre aux Français qui le souhaitent de poursuivre leur projet immobilier

 

Continuité de l’activité pour les entreprises du bâtiment et des travaux publics

« Les entreprises du bâtiment et des travaux publics sont essentielles à la vie économique du pays et à son fonctionnement, en contribuant à des besoins du quotidien des Français comme le logement, l’eau, l’énergie, la gestion des déchets, les transports et les télécommunications » a estimé le gouvernement dans un communiqué et juge « nécessaire d’œuvrer à la poursuite de leur activité, pour éviter une mise à l’arrêt totale des chantiers, qui déstabiliserait non seulement les entreprises concernées mais aussi l’ensemble de la chaîne économique ». A l’issue d’échanges soutenus au cours des derniers jours, les représentants des entreprises du BTP et le Gouvernement se sont accordés sur plusieurs principes permettant de renforcer, dans les tout prochains jours, la continuité de l’activité du secteur et la poursuite des chantiers. Pour préciser l’ensemble des mesures et des procédures applicables et accompagner les professionnels du secteur, les organisations professionnelles des entreprises du bâtiment et des travaux publics diffuseront dans les prochains jours un guide de bonnes pratiques, préalablement validé par les Ministères du Travail et  des Solidarités et de la Santé.  Réalisé en lien avec les professionnels intervenant sur les chantiers et avec l’appui des experts de l’Organisme professionnel de prévention du Bâtiment et des Travaux Publics (OPPBTP), il donnera, pour toutes les entreprises de toutes tailles, une série de recommandations pour assurer des conditions sanitaires satisfaisantes sur les chantiers et poursuivre les activités.