Carrefour de l’eau 2023 : la Bretagne au cœur des problématiques de l’eau

Réunis au Parc des expositions de Rennes les 25 et 26 janvier 2023 à l’occasion du rendez-vous annuel des acteurs de l’eau, élus et techniciens débattent sur les actions à engager pour préserver une ressource et des milieux particulièrement sensibles au dérèglement climatique.

C’est dans un contexte particulier que se déroule la 24e édition du Carrefour des gestions locales de l’eau. Après une année de sécheresse longue et intense qui a touché l’ensemble du territoire français, qui a privé d’eau potable plus d’une centaine de communes, provoqué l’activation des comités de gestion de la ressource en eau sur l’ensemble du territoire national, causé l’assèchement de nombreux cours d’eau sur tout ou partie de leur linéaire, l’heure est aux interrogations. « Il va falloir que l’on regarde à l’avenir comment fournir de l’eau potable à l’ensemble des habitants. Cela suppose de travailler sur les économies d’eau, de lutter contre les pertes en eau dans nos réseaux de distribution avec de gros enjeux financiers pour renouveler ces réseaux » a lancé Michel Demolder, président de la collectivité Eau du bassin rennais en ouverture du salon et abordé un autre sujet majeur sur lequel les acteurs de l’eau attendent des réponses précises : la réutilisation des eaux usées traitées (REUT) qui représentent à peine 1% des volumes d’eau utilisés en France. « Dans une région comme la Bretagne qui accueille de nombreuses industries agroalimentaires fortement consommatrices d'eau, nous devons travailler sur cette notion de REUT et réfléchir aussi à un tarif de l'eau progressif, social et écologique de l’eau» a-t-il ajouté.

La qualité de l’eau, largement abordée à l’occasion des nombreuses conférences et ateliers continue de faire l’objet de toutes les attentions. « La lutte contre les pollutions diffuses est inscrite au sein du Schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) de la Région Bretagne. Le territoire de Rennes métropole s’est donné un objectif : sortir des pesticides de synthèse d'ici 2030, un enjeu fort porté par la collectivité Eau du bassin rennais à travers son programme écologique « Terres de sources » qui associe différents territoires, différents acteurs agricoles, des associations de consommateurs et des associations environnementales. » Face à la hausse du prix de l’énergie qui impacte fortement les budgets des services d'eau potable et d'assainissement, sera également posée la question du prix de l’eau en France.

Alors que des plans d'adaptation et de résilience se construisent dans les territoires, l’heure est à l’action. Si certaines pistes ont récemment été évoquées par Christophé Béchu,  ministre de la Transition écologique, comme la diminution des prélèvements d’eau ou une évolution de la réglementation sur la réutilisation des eaux usées, les élus comme les acteurs de l’eau ne cachent plus leur impatience d’en savoir plus. Face aux conséquences toujours plus visibles du changement climatique, ils veulent agir. « Nous avons un devoir de mobilisation extrême autour des enjeux quantitatifs et qualitatifs autour de la ressource en eau. Nous devons agir vite, nous devons agir avec puissance, nous devons agir collectivement et dans la cohésion, a rappelé Delphine Alexandre, vice-présidente du conseil régional de Bretagne en charge de la santé, l'eau et la biodiversité. Tout un panel de propositions sont en attente qui conditionneront les possibilités d’action sur les enjeux qui se posent à nous ».

La CCI du Morbihan incite les entreprises à la sobriété en eau

La CCI du Morbihan recevait en novembre 2022 le trophée de l’innovation décerné par la FNCCR* pour Ecod'O, un programme de sensibilisation et d'initiation à des économies d'eau dans les entreprises industrielles et touristiques du département. Philippe Rouault, président de la CCI du Morbihan revient pour RCL sur cette expérience inédite récemment reprise par la CCI du Puy-de-Dôme Clermont Auvergne Métropole.

Qu’est-ce que le programme Ecod’O ?

Ecod’O est né de la prise de conscience que l'eau était un bien devenu rare et qu’il fallait engager une démarche collective pour la préserver. Le programme a été initié en 2019 par la préfecture du Morbihan et piloté par la Chambre de commerce et d’industrie du département pour inciter et accompagner les professionnels du tourisme et de l’agroalimentaire dans la réduction de leur consommation en eau. Ce projet partenarial public privé a permis de faire travailler ensemble des entreprises privées avec un certain nombre d’acteurs publics comme l'agence de l'eau Loire-Bretagne, la DREAL, le Conseil régional de Bretagne, les services de l’Etat, l’Association Bretonne des Entreprises de l'Agroalimentaire (ABEA), eau du Morbihan, et aussi des collectivités comme Lorient agglo, Golfe du Morbihan-Vannes agglomération ou Pontivy communauté qui se sont fortement impliquées.

Quel bilan tirez-vous de ce programme qui aborde actuellement son troisième volet ?

Dans les volets 1 et 2 d’Ecod’O, 70 acteurs économiques ont été accompagnées dans leur recherche de sobriété en eau et affichent en moyenne une économie réalisée de 10%. Si les résultats sont satisfaisants du point de vue de la sobriété en eau, les entreprises rapportent que ce travail collectif a été vecteur de cohésion en interne et porteur d’une dynamique incroyable pour tendre vers ces économies de consommation d'eau. Ce travail collaboratif a montré que nous avions tous un intérêt collectif à travailler mieux ensemble. Nous abordons aujourd’hui le troisième volet de ce programme avec une régionalisation sur l’ensemble de la Bretagne en 2023.

Comment aller encore plus loin ?

Nous avons créé un lieu d’échange et de partage, le club Ecod’O, pour que les entreprises puissent partager leurs bonnes pratiques en matière d’économies d’eau. Nous étudions également la création d’une marque Ecod’O afin qu'elles puissent tirer un avantage de leurs actions et bénéficier d’un accompagnement spécifique. Dernier projet en date dans le domaine de l’eau, la volonté de faire de la Bretagne une terre d’expérimentation pour la réutilisation des eaux usées traitées (REUT). Il existe de nombreuses possibilités d’utiliser ces eaux comme le font déjà l’Italie, l’Espagne ou Israël alors France est très en retard sur le sujet. Avec l’Association des entreprises agroalimentaires bretonne (ABEA), les parlementaires morbihannais, la CPME ou encore le Medef, la CCI du Morbihan compte bien identifier les blocages réglementaires susceptibles d'être levés ou assouplis afin de faire bouger les lignes. Le projet Ecod’O nous a donné l’envie d'aller encore plus loin. Nous travaillons à la mise en place d’un programme Eco Carbone. Il s’agirait d’accompagner les entreprises dans un pré diagnostic afin d’identifier les solutions de décarbonation de leur process industriel, de recherche de mix énergétique nouveau et de sobriété énergétique.

*Fédération nationale des collectivités concédantes et régies

Photo : Philippe Rouault, Président de la CCI du Morbihan (crédit : Aude SIRVAIN).

Thierry Burlot, président du comité de bassin Loire-Bretagne : « Parler d'aménagement et de développement du territoire, c'est aussi parler de l'eau ».

Alors à l’heure où une partie du bassin Loire-Bretagne connait encore des restrictions d’usages de l’eau, le comité de bassin a identifié des propositions d’actions, à court et moyen termes, pour contribuer au chantier « eau » de la planification écologique lancé par le gouvernement. Thierry Burlot, son président, enjoint tous les acteurs à se mobiliser autour de cette ressource vitale pour le développement de nos territoires. Entretien.

Quel est le rôle d’un comité de Bassin ?

Le comité de bassin est l'une des rares instances de démocratie participative où les élus sont aux côtés d'acteurs économiques et sociaux pour définir une politique de gestion territoriale de l’eau. En Loire-Bretagne, il est composé de 40 % de collectivités, de 20 % d'usagers non économiques, de 20 % d’usagers économiques et de 20 % de représentants de l'État. Il garantit la concertation, la planification et notamment l’élaboration du schéma d’aménagement de gestion des eaux (SDAGE) qui fixe la stratégie pour retrouver une bonne gestion quantitative et qualitative de l’eau. Plus que jamais, face au changement climatique et ses conséquences, l’eau est au cœur de toutes les politiques publiques. Sans eau, il n’y a pas de développement économique possible.

De quelle manière le comité de bassin Loire-Bretagne envisage-t-il sa contribution au plan « eau » lancé par le gouvernement ?

 Alors que les dernières décennies ont été consacrées à la gestion qualitative des eaux, en raison de la dégradation de la qualité de nos rivières et de nos fleuves pollués par les nitrates et les pesticides, nous sommes désormais rattrapés par des questions de gestion quantitative avec une rapidité que nous n’avions pas imaginée. Sur le bassin Loire-Bretagne, les experts annoncent une baisse de 30% de la ressource en eau en 2050. Et dès cette année, le manque d’eau causera des pertes de production sur le bassin agricole de la Limagne, un territoire exceptionnel à fort potentiel. Rappelons également que certaines centrales nucléaires ont failli être arrêtées l’été dernier par manque d’eau pour refroidir les réacteurs. Le comité de bassin Loire-Bretagne a identifié 70 propositions d’actions autour de la gestion de la ressource, de l’accès à un service d’eau potable organisé et performant mais aussi pour renforcer la résilience des écosystèmes aquatiques. Citons par exemple la construction d’une base de données exhaustive des plans d’eau et retenues existantes, la mise en place d’une conditionalité des aides de l’État et des collectivités à l’engagement chiffré d’actions en faveur de la sobriété des usages de l’eau, le financement et la promotion des services rendus par la nature ou encore la meilleure lisibilité des arrêtés sécheresse.

Concrètement, comment préserver la ressource en eau ?

Nous devons nous réapproprier le sujet de l’eau, cette ressource que nous pensions inépuisable, en réapprenant à bien la gérer collectivement, à la partager, à l'économiser et à la protéger. Concrètement, nous devons mettre en place des mesures d’économies d'eau, recourir à la réutilisation des eaux usées traitées (REUT) comme le font déjà l'Italie l'Espagne, le Portugal ou Israël, travailler sur la performance des réseaux d'eau potable, pour limiter les pertes en eau ainsi que sur l'amélioration des stations de traitement et sur l’assainissement des eaux usées. Plus que jamais, nous devons apprendre à partager les usages parce qu’à l’avenir, certains territoires seront dotés de ressources en eau importantes tandis que d’autres n’en auront plus. Pour cette raison, le comité de bassin que je préside pense que la décentralisation de l'eau doit avoir lieu. En clair, il faut que la politique des schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) au niveau des grands bassins se décline autour de tous les fleuves de Loire-Bretagne. Nous devons mettre en place des PTGE (programmes territoriaux de gestion des eaux) au plus près des territoires en gardant la cohérence hydrographique, anticiper l’évolution des usages de l’eau en agriculture, dans l’industrie, dans le secteur des énergies et en matière d’aménagement du territoire. Il faut également que nous soyons extrêmement vigilants sur le ménagement de la ressource.

Comment rendre plus résilient votre bassin face au changement climatique ?

Les solutions sont multiples pour résoudre les problématiques liées à l’eau mais nous devons privilégier celles fondées sur la nature qui consistent à reconstituer des zones humides, à faire du bocage, à désimperméabiliser les zones bétonnées et goudronnées. C’est ainsi que l’eau de pluie pourra s’infiltrer dans les sols et profiter aux nappes phréatiques. Ensuite, il faudra partager cette eau et faire des choix stratégiques. La planification de l’eau est une question concertée avec l’ensemble des acteurs.

Que pensez-vous de l’initiative du « Parlement de Loire », lancée par un collectif d’acteurs ligériens, qui propose la prise en compte des intérêts de la Loire à travers la reconnaissance de la personnalité juridique du fleuve ?

Cette initiative intéressante nous rappelle que la problématique de l'eau nous concerne tous et nous invite à prendre conscience que notre environnement est fragile. La réappropriation du sujet par les territoires et par les citoyens est un enjeu crucial. Sans consensus, la bataille de l'eau aura lieu.

L’augmentation du coût de l’énergie a-t-elle des conséquences pour les acteurs de l’eau ?

L’augmentation du coût de l'énergie pour les services d'eau et d'assainissement est problématique avec des augmentations qui oscillent autour de 15 à 20%. Si le prix de l'énergie devait poursuivre sa progression à la hausse, l’impact sur le prix de l'eau pourrait être considérable. Il me paraît essentiel de travailler sur l’autoconsommation des services d’eau et d’assainissement. C’est le cas de la station d’épuration de Laillé, près des Rennes, qui grâce à l’installation de trackers photovoltaïques réduit sa consommation énergétique.

 

 

La Bretagne lance sa feuille de route sur l’hydrogène renouvelable

À travers cette feuille de route, partagée avec les acteurs bretons concernés, la Bretagne veut se positionner comme une région leader sur le marché des applications de l’hydrogène renouvelable, tant en termes de compétences détenues par ses entreprises que de diffusion des technologies et d’appropriation par les citoyens. Il s’agit de structurer et développer un secteur économique innovant et générateur d’emplois afin de répondre aux objectifs de la Breizh COP, projet d’avenir pour une Bretagne plus sobre à horizon 2040 qui vise une réduction par 4 des émissions bretonnes de gaz à effet de serre à l’horizon 2050, une diminution de la part de carburants fossiles dans le domaine du transport, intégration des productions énergétiques renouvelables et décarbonées en lien avec les technologies de stockage de l’énergie. Enfin, cette feuille de route vise à assurer le développement durable des territoires et de leur autonomie énergétique. Un premier appel à projets régional a été lancé fin septembre, d’autres suivront en 2020 et 2021.

Les filières d’avenir

L’accent a été mis sur l’ambition industrielle forte qui sera portée dans le domaine des applications navales et de productions offshores d’hydrogène. Cette filière bretonne de l'hydrogène se développera autour des spécificités régionales comme l'industrie maritime, les projets smart grids déployés sur le territoire, les énergies marines renouvelables, les applications de stockage et la logistique de l'agro-alimentaire. Car d’ici à 2030, la Bretagne s’est fixé des objectifs quantitatifs à savoir la création de huit boucles locales hydrogène renouvelable et bas carbone, trois écosystèmes portuaires maritimes utilisant l’hydrogène renouvelable, une première flottille de 10 navires pilotes, 2 800 véhicules ainsi que la mise en œuvre d’un démonstrateur de production d’hydrogène offshore pour 2025 permettant à la filière d’être au rendez-vous des enjeux de productions industrielles d’hydrogène offshore pour les futurs parcs éoliens en mer, entre 2040 et 2050.

Tourisme : une plateforme pour la mise en œuvre des démarches sanitaires en Bretagne

Pour accompagner les professionnels du tourisme dans la mise en œuvre des protocoles sanitaires au sein de leur établissement et leur permettre une réouverture dans les meilleurs délais et dans les meilleures conditions possibles, la région Bretagne ouvre une plateforme régionale unique, recensant tous les documents utiles, protocoles ou chartes sanitaires, fiches métiers, guides pratiques, FAQ, et permettant aux professionnels de prendre rendez- vous avec des conseillers de leur territoire ou de leur secteur d’activité. Des webinaires et formations de présentation des guides sanitaires par les fédérations qui les ont construits et rédigés seront proposés dans les prochains jours puis mis en ligne sur la plateforme. Par ailleurs, une fois inscrit sur la plateforme, le professionnel peut bénéficier d’un échange avec les conseillers disponibles pour l’aider à décrypter les protocoles et à les appliquer au sein de son établissement. Une quarantaine de conseillers se relaient tout au long de la semaine pour répondre aux mieux aux questions des professionnels, épaulés si besoin par les experts de la filière, présidents ou animateurs des fédérations professionnelles.

www.demarches-sanitaires-tourisme.bzh

Le tourisme breton fortement impacté par la crise sanitaire

Et pourtant, l’année avait bien commencé. Après les bons résultats de l’année 2019, les mois de janvier et février 2020 affichaient des résultats équivalents voire supérieurs à ceux de l’an passé, le calendrier du printemps s’annonçait favorable à l’activité touristique. La montée en puissance de l’épidémie, puis l’appel au confinement du 17 mars ont stoppé net cet optimisme comme le montre une enquête réalisée ce mois-ci par la région Bretagne, le comité régional du tourisme, les partenaires publics et les professionnels du secteur auprès de quelque 3000 hébergeurs, équipements culturels et de loisirs, centres nautiques et agences événementielles. En mars, environ 75% des entreprises bretonnes du tourisme affichent des pertes de chiffre d’affaires supérieures à 50% (30% supérieures à 75%). Pour le mois d’avril, près de 90% des entreprises annoncent d’ores et déjà des chiffres d’affaires proches de zéro avec des baisses supérieures à 90% par rapport à 2019. En Bretagne, le secteur du tourisme enregistre 6,6 milliards d’euros de consommation touristique annuelle, avec des nuitées, de la mi-mars à la mi-mai qui représentent 12% des nuitées annuelles. Ces deux mois de confinement conduiront donc mécaniquement à une perte de près de 800 millions d’euros pour le secteur du tourisme. Et si le 11 mai peut représenter la date d’une éventuelle levée du confinement, elle ne signifiera pas pour autant, selon les professionnels, la reprise du tourisme.

 

Les Bretons consultés sur leur avenir

Qualité de vie, environnement, emploi et solidarité. Voici les quatre enjeux inhérents aux grands défis du territoire et à l’action territoriale sur lesquels 40.000 Bretons seront interrogés pendant deux mois, à compter du 16 décembre, dans le cadre de la plus grande consultation citoyenne jamais réalisée sur le territoire. Cette opération expérimentale réalisée dans le cadre de la Breizh Cop, en partenariat avec la Région Bretagne et l’Etat, et financée par la Banque des territoires, vise à mieux connaître leurs attentes et à les associer davantage à l’action collective et à l'élaboration des futures politiques publiques. Les Bretons seront invités à faire des propositions sur quatre questions ouvertes, via une campagne de recrutement sur les réseaux sociaux menée sur une base représentative de la population bretonne. Les résultats donneront lieu à des ateliers de travail spécifiques avec des contributeurs et des acteurs locaux pour co-construire les réponses qui pourraient être apportées en termes d’actions concrètes. « Cette vaste consultation s’inscrit dans la dynamique de notre Breizh cop, précise le président de Région Loïg Chesnais-Girard. Cette démarche participative associe déjà depuis deux ans de nombreux acteurs locaux et citoyens, dans le but de définir ensemble un projet durable de territoire à horizon 2040. »