Par Didier Cultiaux, préfet de région honoraire
Toute organisation, publique ou privée, a besoin d’un encadrement supérieur pour définir et exécuter sa stratégie, choisir et animer les équipes, s’assurer des résultats et apporter les adaptations résultant de leurs évaluations. Cet encadrement supérieur a vocation à évoluer, car les temps changent tout comme les attentes, tant des administrés que des clients. C’est pourquoi, l’esprit de réforme est en soi louable ! Reste à en connaître les réelles motivations
et les modalités pratiques d’application. Il en va ainsi de l’annonce par le président de la République, le 8 avril, subitement et en dernière année de son quinquennat, d’une réforme de l’encadrement supérieur de l’État, censée s’inscrire dans une politique plus ambitieuse de transformation de l’action publique qui aurait supposé la réorganisation préalable des services centraux et déconcentrés de l’État, une maîtrise et une distribution autre des effectifs, une réduction drastique des normes, des études d’impact, une concertation préalable avec les intéressés et une participation parlementaire. L’exécutif justifie sa démarche par des ambitions d’une plus grande diversité des origines et des compétences, d’une mobilité accrue interministérielle et entre les trois fonctions publiques, d’un meilleur balisage des parcours professionnels, de la substitution d’une logique de corps à celle de métier et d’une formation ainsi que d’une évaluation continue. Le surcroît d’efficacité devant en résulter est souvent invoqué, moins les concepts évidents d’autorité et de responsabilité, à ce niveau hiérarchique sont rarement évoqués. Ainsi, disparaît l’École nationale d’administration, commode bouc-émissaire populiste, que doit remplacer un Institut national du service public. Il appartient à la mission Bassères, animée par l’actuel directeur général de Pôle emploi et ancien chef du service de l’Inspection générale des finances et composée d’un collège mixte, de rendre ses recommandations de préfiguration en novembre sur ce sujet. Après le dépôt au Parlement, le 3 juin dernier, d’une ordonnance-cadre, un vaste chantier réglementaire s’ouvre pour créer un corps commun d’administrateurs de l’État, une délégation interministérielle à l’encadrement supérieur de l’État (DIESE) rattachée à Matignon et coexistant avec la Direction générale de l’Administration et de la Fonction publique (DGAFP) rattachée à Bercy et les directions ministérielles de ressources humaines et inventer des statuts d’emplois, faute de corps, pour des filières métiers particulières, préfectorale et diplomatique notamment. Des comités de concertation, de suivi et miroirs foisonnent. Une soixantaine de décrets dont une dizaine en Conseil d’État est à rédiger. La date butoir du 1er janvier 2022 pour la mise en oeuvre des fondamentaux de la réforme paraît d’ores et déjà, techniquement compromise
et politiquement aléatoire en période pré-présidentielle.
En fait, pour l’encadrement supérieur des trois fonctions publiques, ce qui importe sur le fond, c’est :
Comme on le voit, l’encadrement supérieur public vit un moment historique. Il peut en résulter réel progrès ou désillusion. Pour éviter cette dernière, l’exécutif gagnera à se rappeler que tout changement radical, pour être légitime et applicable, suppose l’adhésion des intéressés.
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