Les infrastructures routières du futur

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31 août 2012

Entretien avec Nicolas Hautière,
Directeur de projet « Route 5e Génération » à l’IFFSTTAR*

Le concept d’une « route intelligente » fait son chemin depuis quelques années. Fini les pavés, les chemins de terre, les vieux asphaltes et place à la route de demain! Elle se veut intelligente et responsable. Cette route intelligente est au coeur des préoccupations des pouvoirs publics, motivés par les enjeux que représentent la sécurité routière, l’optimisation des infrastructures existantes et l’augmentation des services rendus aux usagers.

Quelles technologies nouvelles, en matière d’infrastructures routières, sont en cours de validation dans les laboratoires de l’IFSTTAR?
Nos laboratoires fourmillent d’innovations technologiques susceptibles d’apparaître demain sur les réseaux routiers avec trois mots d’ordre : développement durable, émissivité et modularité des routes. Tout l’enjeu réside dans le déploiement de ces technologies, d’où la mise en place du projet « route de 5e génération », dont l’objectif est de lister et structurer les projets qui nous semblent viables, afin de les tester en grandeur nature sur différents réseaux.

D’énormes progrès ont été réalisés sur les matériaux. En voici quelques exemples. Les techniques d’auto-réparation évitent de détruire puis refaire une chaussée et minimisent le temps d’intervention. L’IFSTTAR a par exemple développé un enduit hydraulique fibré gravillonné qui permet d’accroître la durée de vie d’une chaussée de dix ans environ. Cette technique pourrait être appliquée sur des réseaux fortement circulés où la maintenance est problématique.

Une autre technologie consiste à intégrer des fibres métalliques dans les chaussées qui, sous l’effet d’une plaque à induction, vont chauffer, fondre et permettre de rajeunir le matériau. Dans le même ordre d’idée, des tests menés aux Pays-Bas visent à exploîter le caractère auto-cicatrisant du bitume. Il est possible, en effet, d’inclure dans le bitume des capsules qui, sous le poids des charges roulantes, au fur et à mesure que le bitume va s’abîmer, vont éclater et libérer du bitume frais qui va permettre au matériau de conserver sa souplesse.

Nous travaillons aussi sur l’optimisation du bruit, le but étant de réduire la nuisance à l’émission en travaillant sur des classes de granulats. Ceci va permettre de créer de nouvelles générations d’enrobés drainants qui vont, d’une part, permettre d’éviter les projections d’eau et aussi diminuer les vibrations acoustiques. On peut également envisager d’incorporer du caoutchouc issu du recyclage de pneumatiques, sous forme de poudre, qui, additionné au bitume fera gagner quelques décibels supplémentaires sur l’efficacité acoustique.

En matière de dépollution, des technologies de photocatalyse par dyoxyde de titane, qui visent à absorber les polluants contenus dans l’atmosphère sont expérimentées à Vanves (92) et à Dinan.

Nous menons aussi des travaux sur la modularité des routes, à savoir des « routes puzzle » que l’on puisse démonter et réparer en usine comme des pièces de voitures. Saint-Aubin les Elbeuf près de Rouen et Nantes ont mis en oeuvre cette technologie testée aux Pays-Bas sur les autoroutes.

Un deuxième enjeu consiste à transformer la route en lieu de production d’énergie et vecteur d’énergie. Nous avons imaginé une route solaire en plaçant des panneaux photovoltaïques sur les déblais des routes ou directement sur la route. Et de la même manière que l’on installe des pompes à chaleur dans les bâtiments pour capter/stocker l’énergie, on peut envisager de stocker l’énergie thermique fournie par le soleil dans la journée et de la réutiliser, l’hiver, pour réguler les températures de la route et la dégivrer. Cette technique existe déjà en Allemagne, en Suisse et au Japon.

La route peut aussi transmettre de l’énergie par induction. Le constructeur bombardier commence, en Belgique, à alimenter ainsi des tramways sans fil. Avec cette technologie, on pourrait s’affranchir des capacités des batteries de véhicules électriques.

Enfin, le troisième aspect de nos travaux de recherche, concerne les transports intelligents avec l’émergence des systèmes coopératifs qui permettent de faire communiquer entre eux les véhicules, les usagers ou piétons et les bords de route avec les centres de trafic. On parle alors de systèmes d’information distribués grâce auxquels il est possible de connaître, en temps réel, tous les usages et d’adapter l’infrastructure ou les services à la demande. L’idée est de pouvoir fournir des limites de vitesse adaptées en fonction des conditions météo, ou bien, en fonction de l’affluence, attribuer des voies de circulation. Un prémice de cette technologie existe à St-Nazaire où le conseil général de Loire- Atlantique a équipé le pont de plots leds réversibles. Selon le moment de la journée, la gestion du trafic sur le pont n’est pas la même.

Quelles sont les chances de ces technologies d’être déployées à grande échelle ?
Notre défi est de réussir à intégrer ces technologies nouvelles sur le terrain. Or, nous sommes passés d’un système où l’on construisait de nouvelles routes équipées des dernières technologies à un système où l’on ne construit plus de nouvelles routes. Il nous faut trouver une solution pour que les routes rénovées puissent, elles aussi, disposer des nouvelles technologies. Cela suppose aussi que les laboratoires s’adaptent à ce changement. Par ailleurs, le domaine comporte beaucoup plus d’acteurs qu’auparavant qui font leurs propres chartes d’innovation. Or trop d’acteurs figent l’innovation. Il faudrait mutualiser les expériences à travers par exemple le développement de démonstrateurs technologiques de grande ampleur. De même, il faudrait que l’expérience menée par une collectivité puisse servir à d’autres pour éviter de refaire les mêmes erreurs. C’est tout l’enjeu de ces prochaines années.

A quand les premiers démonstrateurs ?
L’idée est de répartir les démonstrateurs dans le temps. Le phasage se fera en trois temps. Nous sommes actuellement dans une phase de recensement et de test de solutions. Des démonstrateurs existent déjà sur différents réseaux dans certains domaines comme la maintenance furtive, les chantiers furtifs, l’auscultation à distance des infrastructures, les systèmes de communication, etc. L’idée est de pouvoir être suffisamment structuré d’ici un à deux ans pour commencer à mettre en place les premiers démonstrateurs un peu plus intégrants sur différents territoires. A moyen terme, par fertilisation croisée, nous combinerons les différentes idées qui auront marché pour créer des démonstrateurs complets.

 

Propos recueillis par Blandine Klaas

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Un maire, donc OPJ, peut-il l’être en dehors de sa commune ?
Réponses :
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Tous les pouvoirs du Maire en tant que représentant de l'Etat ne lui sont octroyés que sur son territoire.
Non uniquement dans la commune où il est élu maire.

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