La réforme territoriale veut faire des intercommunalités la nouvelle ossature du territoire. Une évidence pour Saint-Quentin-en-Yvelines, constituée en communauté d’agglomération depuis 2004 et deuxième pôle économique de l’Ouest parisien. Son président, Michel Laugier, entend renforcer l’attractivité de ce territoire qui compte parmi ses atouts une situation géographique enviable, un tissu d’entreprises dynamiques, des réseaux de communication et des équipements intercommunaux de grande envergure.
Que pensez-vous de la montée en puissance des intercommunalités voulue par la réforme territoriale ?
Michle Laugier : Saint-Quentin-en- Yvelines est l’une des cinq villes nouvelles de la région parisienne créées par l’État dans les années soixante-dix pour rationaliser l’utilisation de l’espace en Île-de-France. Nous avons été l’un des premiers laboratoires de l’intercommunalité. Ce passé intercommunal très fort, depuis plus de 40 ans, nous a permis de devenir une agglomération de 146 000 habitants, dynamique, qui constitue aujourd’hui le 2e pôle économique de l’Ouest parisien, après La Défense.
J’ai récemment défendu devant les membres de la commission régionale de la coopération intercommunale (CRCI) la nécessité de créer des intercommunalités garantissant une qualité optimale des services apportés aux habitants et aux opérateurs économiques en matière de transports, d’habitat et d’environnement.
Réussite et dynamisme caractérisent la communauté d’agglomération de Saint- Quentin-en-Yvelines (CASQY). Quels sont les principaux atouts de ce territoire ?
Saint-Quentin-en-Yvelines accueille plus de 7 000 entreprises et 100 000 salariés. Notre territoire est doté d’un tissu de PME très dynamiques. Il est également choisi par de prestigieuses entreprises, françaises et étrangères, pour y installer leur siège social parmi lesquelles Bouygues, Renault, Airbus, Thales, Safran, Mercedes ou encore Nissan. L’immobilier d’entreprises est très dynamique et l’année 2014 a été exceptionnelle avec un niveau de transactions inégalé depuis 10 ans.
Saint-Quentin-en-Yvelines est aussi une ville universitaire qui accueille de grandes écoles et plus de 15 000 étudiants. L’École des Mines-Paris Tech devrait s’y installer prochainement et l’École supérieure des techniques aéronautiques et de construction automobile (ESTACA) fera sa rentrée en septembre prochain.
Un environnement agréable, une situation privilégiée entre les châteaux de Versailles et de Rambouillet, des moyens de transport et des réseaux routiers nombreux sont également des atouts indéniables. L’agglomération jouit d’une cohérence territoriale, d’une réussite économique et d’un bon équilibre dans l’aménagement de la ville. Il est vrai que l’appartenance à la ville nouvelle nous a permis, dans les premiers temps, de recevoir des aides de l’État pour notre développement. Les équipements publics (écoles, gymnases, crèches) ont suivi au même rythme que la construction des logements. Trois grands équipements intercommunaux — le golf national, le vélodrome national, le théâtre, grande scène nationale — confortent l’attractivité du territoire. Nous avons par ailleurs créé le plus grand réseau français de médiathèques et de lecture publique en France avec 1,5 millions d’ouvrages prêtés chaque année.
Nous sommes toujours en quête d’amélioration. Demain, nous devrions accueillir au moins une gare de la ligne de métro du Grand Paris qui reliera l’agglomération au TGV et à l’aéroport d’Orly. Ce sera un nouvel atout pour notre territoire.
Vous vous êtes battu, en début d’année, contre le projet de l’ancien préfet de région qui envisageait la création d’une d’agglomération géante de 57 communes et 800 000 habitants au 1er janvier 2016. Un contre-projet que vous avez soutenu prévoit notamment le rattachement de nouvelles communes à votre agglomération. Comment la CASQY vit-elle ce regroupement ?
Le schéma présenté par le préfet de Région intégrait Saint-Quentin-en-Yvelines dans une intercommunalité de 800 000 habitants regroupant 57 communes, à cheval sur les départements des Yvelines et de l’Essonne. C’était la mort assurée de notre agglomération. Nous n’étions ni dans un même département, ni dans un même bassin de vie et nous ne portions pas les mêmes projets. Nous n’avions rien en commun avec de nombreuses communes auxquelles nous aurions dû nous rallier. Je ne sais pas comment nous aurions pu trouver un accord de gouvernance. C’est pourquoi, avec l’ensemble des présidents des intercommunalités concernées, nous avons rédigé une contre-proposition prévoyant la création de trois agglomérations tout en permettant à chacune d’atteindre le seuil de 200 000 habitants requis la loi.
Depuis plusieurs années, des communes situées aux portes de notre intercommunalité souhaitaient travailler avec nous. C’est donc de manière naturelle qu’elles ont confirmé cette volonté à l’issue des élections municipales. La communauté de communes de l’Ouest Parisien (Villepreux, Plaisir, Les Clayessous- Bois), mais aussi Maurepas et Coignières devraient nous rejoindre. Il ne s’agit pas d’un mariage forcé. Bien au contraire. C’est un mariage voulu avec une réelle volonté de ces communes de travailler avec nous dans la logique d’un vrai bassin de vie. Tous les élus concernés ont validé cette nouvelle organisation. Elle ne sera effective qu’après la publication d’un arrêté défi nitif en fi n d’année.
Quels seront les impacts de cet agrandissement ?
Le nouveau Saint-Quentin-en-Yvelines deviendra le premier pôle commercial du département des Yvelines et nous renforcerons l’attractivité de notre territoire grâce à 4 gares supplémentaires. Les commerces vont représenter environ 30 % des emplois et 40 % des entreprises du grand Saint-Quentin-en-Yvelines. Toutefois, nos projets ne se réaliseront que si la situation financière de la CASQY continue à se pérenniser et que l’engagement de l’État reste maintenu sur le long terme.
Nous commençons déjà à travailler avec les maires et les directeurs généraux de services des 5 communes qui devraient nous rejoindre à partir du 1er janvier 2016. Nous allons profiter de ce changement pour revoir les compétences de la communauté d’agglomération.
Quelles sont les compétences de la CASQY ?
En plus de ses compétences de base, Saint-Quentin-en-Yvelines a pris en charge des compétences optionnelles comme la culture et le sport. Nous avons construit des équipements communautaires comme la scène nationale, le réseau de lecture public et des équipements sportifs de grande envergure. Il s’agit-là d’un un socle commun bénéfique pour le rayonnement de notre agglomération. Cependant, il revient à chaque commune d’assurer sa propre politique culturelle et sportive.
J’estime que le développement économique est aussi une compétence de l’agglomération. Il contribue fortement à son dynamisme. C’est d’ailleurs notre source de revenus la plus importante. Faciliter le lien entre l’université, les grandes écoles et l’entreprise, accueillir des entreprises génératrices d’emplois pour nos habitants fait partie de nos actions. Le développement économique est une condition sine qua non de la bonne santé d’une agglomération.
Or, jusqu’à présent, tous les niveaux de collectivités détiennent la compétence du développement économique. En tant qu’élu, je constate que les financements croisés ne sont pas très efficaces parce qu’on ne sait jamais très bien qui fait quoi. Il faudrait que les compétences et les responsabilités soient mieux défi nies et mieux organisées pour plus d’efficacité.
L’objectif d’une communauté d’agglomération est aussi de pouvoir mutualiser les charges entre plusieurs villes. Quelle est l’expérience de la CASQY ?
Ce que l’on impose aujourd’hui aux communes, nous le faisons depuis longtemps. Les recettes en provenance des entreprises sont transférées directement à l’intercommunalité. C’est ainsi que nous avons financé divers équipements au fur et à mesure de l’évolution de la ville.
Nous avons un degré d’intégration intercommunale de 50 %. Par comparaison, il n’est que de 15 % à la communauté d’agglomération de Versailles Grand Parc. L’eau et l’assainissement, l’éclairage public, la gestion des feux tricolores, l’urbanisme sont des services que nous avons mutualisés depuis bien longtemps. Prochainement, nous prendrons en charge la gestion des déchets conformément aux nouveaux textes de loi. Pour autant, il ne faut pas oublier que l’intercommunalité travaille en partenariat avec les communes. Ces dernières conservent leur identité.
Saint-Quentin-en-Yvelines bénéficie d’un avantage majeur puisque nous savons déjà comment nous y prendre. C’est rassurant pour les communes qui nous rejoignent. Notre système fonctionne bien et notre objectif est de le faire fonctionner encore mieux. L’enjeu à venir consistera à nous adapter aux nouvelles contraintes financières et aux nouveaux textes de loi.
De nombreux maires s’inquiètent de la perspective d’intercommunalités puissantes. Vous avez vous-même une double casquette de maire de Montigny- le-Bretonneux et de président d’intercommunalité. Quel est votre point de vue ?
Certains maires craignent de ne plus avoir de vision sur l’urbanisme et de ne plus signer les permis de construire. Nous avons dépassé ce cap. C’est sur la façon dont on gère une collectivité qu’il faut se pencher. En matière de gouvernance, je considère que l’intercommunalité doit travailler avec les villes. La compétence nous incombe, certes, mais rien ne doit se faire contre l’avis d’une ville. A Saint- Quentin-en-Yvelines, nous avons souhaité la mise en place d’un conseil des maires auquel sont soumis les grands sujets importants qui seront portés par la communauté d’agglomération. Nous essayons ainsi de gérer au mieux les intérêts des uns et des autres, quelle que soit la couleur politique. Tous nos documents sont validés à l’unanimité. Chaque maire connaît les intérêts de sa commune mais il connaît aussi les grands enjeux de l’intercommunalité. Nous parvenons toujours à trouver une vision commune sur les grands sujets d’avenir du territoire.
Quels sont les grands projets à court et moyen termes de la CASQY ?
La ligne 18 de métro qui reliera notre agglomération à Orly, à la gare TGV de Massy et au plateau de Saclay est le premier grand projet. Nous devons réussir cette liaison car une partie des habitants de Saint-Quentin-en-Yvelines est directement concernée par le contrat de développement territorial de la partie yvelinoise de l’Opération d’intérêt national (OIN) Paris-Saclay. Par ce document, l’État, la Région, les intercommunalités et les collectivités locales envisagent ensemble l’aménagement autour des futures gares du métro du Grand Paris. Par ailleurs, nous devons poursuivre le développement et l’amélioration des transports au quotidien pour être encore plus performants. En troisième lieu, nous allons continuer à accueillir de nouvelles populations. Une priorité est donnée au développement économique, avec une volonté affichée de rapprocher les grandes entreprises, les PME, les grandes écoles et l’université. Aujourd’hui, nous proposons de la qualité sur notre territoire. Nous souhaitons transformer cette qualité en excellence. Nous travaillons également sur d’autres projets comme l’organisation à Saint-Quentin-en-Yvelines, en 2018, de la plus grande compétition de golf au monde, la Ryder Cup. Nous espérons accueillir plus de 60 000 visiteurs quotidiennement durant les 4 jours de compétition. Nous sommes également très attentifs à la candidature de Paris aux Jeux Olympiques de 2024. Nous souhaiterions nous positionner en agglomération olympique et accueillir les compétitions de cyclisme sur piste, BMX et VTT et, bien entendu, la discipline de golf qui fait son retour aux JO. Ces événements nous aideront à accroître notre notoriété aux niveaux national et international. Cependant, l’accueil des nouvelles communes au sein de notre collectivité est l’enjeu majeur des prochains mois et des prochaines années. Nous souhaitons faire de cet élargissement un atout pour être plus compétitif.
Propos recueillis par Blandine Klaas
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