Alors à l’heure où une partie du bassin Loire-Bretagne connait encore des restrictions d’usages de l’eau, le comité de bassin a identifié des propositions d’actions, à court et moyen termes, pour contribuer au chantier « eau » de la planification écologique lancé par le gouvernement. Thierry Burlot, son président, enjoint tous les acteurs à se mobiliser autour de cette ressource vitale pour le développement de nos territoires. Entretien.
Quel est le rôle d’un comité de Bassin ?
Le comité de bassin est l'une des rares instances de démocratie participative où les élus sont aux côtés d'acteurs économiques et sociaux pour définir une politique de gestion territoriale de l’eau. En Loire-Bretagne, il est composé de 40 % de collectivités, de 20 % d'usagers non économiques, de 20 % d’usagers économiques et de 20 % de représentants de l'État. Il garantit la concertation, la planification et notamment l’élaboration du schéma d’aménagement de gestion des eaux (SDAGE) qui fixe la stratégie pour retrouver une bonne gestion quantitative et qualitative de l’eau. Plus que jamais, face au changement climatique et ses conséquences, l’eau est au cœur de toutes les politiques publiques. Sans eau, il n’y a pas de développement économique possible.
De quelle manière le comité de bassin Loire-Bretagne envisage-t-il sa contribution au plan « eau » lancé par le gouvernement ?
Alors que les dernières décennies ont été consacrées à la gestion qualitative des eaux, en raison de la dégradation de la qualité de nos rivières et de nos fleuves pollués par les nitrates et les pesticides, nous sommes désormais rattrapés par des questions de gestion quantitative avec une rapidité que nous n’avions pas imaginée. Sur le bassin Loire-Bretagne, les experts annoncent une baisse de 30% de la ressource en eau en 2050. Et dès cette année, le manque d’eau causera des pertes de production sur le bassin agricole de la Limagne, un territoire exceptionnel à fort potentiel. Rappelons également que certaines centrales nucléaires ont failli être arrêtées l’été dernier par manque d’eau pour refroidir les réacteurs. Le comité de bassin Loire-Bretagne a identifié 70 propositions d’actions autour de la gestion de la ressource, de l’accès à un service d’eau potable organisé et performant mais aussi pour renforcer la résilience des écosystèmes aquatiques. Citons par exemple la construction d’une base de données exhaustive des plans d’eau et retenues existantes, la mise en place d’une conditionalité des aides de l’État et des collectivités à l’engagement chiffré d’actions en faveur de la sobriété des usages de l’eau, le financement et la promotion des services rendus par la nature ou encore la meilleure lisibilité des arrêtés sécheresse.
Concrètement, comment préserver la ressource en eau ?
Nous devons nous réapproprier le sujet de l’eau, cette ressource que nous pensions inépuisable, en réapprenant à bien la gérer collectivement, à la partager, à l'économiser et à la protéger. Concrètement, nous devons mettre en place des mesures d’économies d'eau, recourir à la réutilisation des eaux usées traitées (REUT) comme le font déjà l'Italie l'Espagne, le Portugal ou Israël, travailler sur la performance des réseaux d'eau potable, pour limiter les pertes en eau ainsi que sur l'amélioration des stations de traitement et sur l’assainissement des eaux usées. Plus que jamais, nous devons apprendre à partager les usages parce qu’à l’avenir, certains territoires seront dotés de ressources en eau importantes tandis que d’autres n’en auront plus. Pour cette raison, le comité de bassin que je préside pense que la décentralisation de l'eau doit avoir lieu. En clair, il faut que la politique des schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) au niveau des grands bassins se décline autour de tous les fleuves de Loire-Bretagne. Nous devons mettre en place des PTGE (programmes territoriaux de gestion des eaux) au plus près des territoires en gardant la cohérence hydrographique, anticiper l’évolution des usages de l’eau en agriculture, dans l’industrie, dans le secteur des énergies et en matière d’aménagement du territoire. Il faut également que nous soyons extrêmement vigilants sur le ménagement de la ressource.
Comment rendre plus résilient votre bassin face au changement climatique ?
Les solutions sont multiples pour résoudre les problématiques liées à l’eau mais nous devons privilégier celles fondées sur la nature qui consistent à reconstituer des zones humides, à faire du bocage, à désimperméabiliser les zones bétonnées et goudronnées. C’est ainsi que l’eau de pluie pourra s’infiltrer dans les sols et profiter aux nappes phréatiques. Ensuite, il faudra partager cette eau et faire des choix stratégiques. La planification de l’eau est une question concertée avec l’ensemble des acteurs.
Que pensez-vous de l’initiative du « Parlement de Loire », lancée par un collectif d’acteurs ligériens, qui propose la prise en compte des intérêts de la Loire à travers la reconnaissance de la personnalité juridique du fleuve ?
Cette initiative intéressante nous rappelle que la problématique de l'eau nous concerne tous et nous invite à prendre conscience que notre environnement est fragile. La réappropriation du sujet par les territoires et par les citoyens est un enjeu crucial. Sans consensus, la bataille de l'eau aura lieu.
L’augmentation du coût de l’énergie a-t-elle des conséquences pour les acteurs de l’eau ?
L’augmentation du coût de l'énergie pour les services d'eau et d'assainissement est problématique avec des augmentations qui oscillent autour de 15 à 20%. Si le prix de l'énergie devait poursuivre sa progression à la hausse, l’impact sur le prix de l'eau pourrait être considérable. Il me paraît essentiel de travailler sur l’autoconsommation des services d’eau et d’assainissement. C’est le cas de la station d’épuration de Laillé, près des Rennes, qui grâce à l’installation de trackers photovoltaïques réduit sa consommation énergétique.
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