INITIATIVE. Insuffisance de connexion des écoles, absence d’organisation de l’offre de ressources numériques…, la Cour des comptes dresse un bilan assassin sur le « service publique du numérique éducatif ». Explications.
Six ans après la création du « service public du numérique éducatif », inscrit dans la refondation de l’École en 2013, la Cour des comptes dresse un premier bilan dans un rapport récent : Un concept sans stratégie, un déploiement inachevé. En d’autres termes : le nouveau service public numérique dans l’éducation est pour l’heure un échec. Pourtant la feuille de route pour le système scolaire était claire : « Former au numérique les citoyens et les professionnels de demain, mais aussi utiliser les techniques numériques comme un puissant levier de transformation pédagogique, susceptible de faire évoluer les méthodes d’enseignement, d’améliorer les apprentissages et de permettre l’évaluation en continu des résultats, in fine de favoriser la réussite des élèves. » D’autant que les investissements entre 2013 et 2017 ont été conséquents : 2 Md pour les collectivités et près de 300 M pour l’État, qui avait annoncé 1 Md initialement.
Pour les experts de la rue de Cambon, si les investissements ne portent pas leurs fruits, c’est que le cadre d’intervention publique est « fondé sur le financement d’équipements individuels » et sur « une politique de guichet peu sélective ». En d’autres termes, l’État aurait dû élaborer une stratégie fondée sur une analyse fine des besoins à pourvoir dans une logique d’harmonisation des équipements selon le niveau scolaire et les collectivités pour éviter les inégalités. Pire encore : il aurait dû se centrer sur la transformation pédagogique attendue et la formation des enseignants qui doit l’accompagner. Du coup, faute de formation initiale et continue suffisante et d’accompagnement approprié, « seule une minorité d’enseignants est à l’aise avec une pédagogie appuyée sur le numérique et se trouve en mesure d’en exploiter les potentialités pour améliorer les apprentissages des élèves », constatent les experts. Autre reproche de la Cour des comptes : celui d’avoir sacrifié les réseaux et les infrastructures à l’équipement des élèves. Un investissement pourtant de taille qui aurait dû faire basculer l’école dans une nouvelle ère numérique, et qui finalement s’est transformé en plan « tablettes ».
Pour rectifier sa trajectoire et assurer ainsi un déploiement égal du numérique, la Cour recommande de définir un « socle numérique de base » pour chaque catégorie d’établissement. Elle souhaite le rétablissement de la certification numérique des enseignants, mais aussi que le soutien public à l’achat d’équipements individuels soit ciblé sur critères sociaux. Mais la principale recommandation concerne la politique d’ensemble : « S’inscrire dans la doctrine d’emploi du programme d’investissements d’avenir en ne mobilisant ses financements, dans le domaine du numérique éducatif, que vers des actions traduisant une véritable logique d’investissement ou de soutien à l’expérimentation et à l’innovation pédagogiques ». Et donc abandonner le plan « tablettes ».
Danièle Licata
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