Dégel du point d’indice des fonctionnaires, flambée des prix de l’énergie et revalorisation du revenu de solidarité active (RSA)... Mais pour les collectivités territoriales, la rallonge budgétaire de 750 millions d’euros suffira-t-elle à compenser, alors que la facture ne cesse de gonfler depuis juillet dernier dans un contexte de tension inflationniste ?
C’est définitif. Le Parlement a adopté le 4 août dernier, par un ultime vote du Sénat après celui de l’Assemblée nationale, le second volet du paquet de mesures en faveur pouvoir d’achat. Au total, le projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2022 ouvre 44 milliards d’euros de crédits, pour les mesures en faveur du pouvoir d’achat et la renationalisation à 100 % d’EDF (9,7 milliards d’euros).
Parmi les mesures les plus concertantes, celle de la revalorisation des retraites et des prestations sociales. Concrètement, les pensions de retraite et d’invalidité des régimes de base ont été revalorisées de 4 % rétroactive- ment au 1er juillet. Cumulée à celle d’un peu plus de 1 % intervenue en janvier, la hausse se rapproche du niveau de l’inflation. De la même façon, les prestations familiales et les minima sociaux (RSA, AAH, Aspa) ont été revalorisés à leur tour de 4 %. Même chose pour les bourses étudiantes. Vient s’ajouter la remise de 30 centimes sur les carburants en septembre et en octobre. C’est une mesure très attendue par les automobilistes qui bénéficient déjà d’une réduction de 18 centimes par litre de carburant. Cette aide sera ensuite abaissée et représentera 10 centimes par litre en novembre et en décembre. À noter, cette remise de 30 centimes est cumulable avec celle de TotalEnergies qui sera de 20 centimes du 1er septembre au 1er novembre dans toutes les stations-service du groupe.
Ces mesures en faveur du pouvoir d’achat viennent se greffer à l’augmentation du point d’indice des fonctionnaires voté lors du premier volet en juillet dernier. En effet, le décret n°2022-994 du 7 juillet 2022 « portant majoration de la rémunération des personnels (...) des collectivités territoriales (...) » prévoit notamment, à compter du 1er juillet, une augmentation de 3,5 % du point d’indice des agents des collectivités locales (fonctionnaires et contractuels). Après un gel depuis douze ans, Il s’agit de la plus forte revalorisation depuis 1985, soit 37 ans, même si ce rattrapage reste inférieur à l’inflation ! Au total, 700000 agents pourront ainsi dépasser le SMIC. « Si une telle décision répond aux attentes légitimes des agents, le coût de cette mesure pour les collectivités est lourd : 7,47 milliards d’euros (hors pensions), avertit François Ecalle, ancien rapporteur général de la Cour des comptes, président de Fipeco.fr. Il est vrai que cette revalorisation immédiate constitue une nouvelle charge pour les communes dont le budget a déjà été lourdement impacté des suites de la crise sanitaire et de l’augmentation exponentielle des prix de l’énergie.
Soutien aux collectivités locales
L’Etat n’avait prévu aucune compensation des dépenses qu’il impose aux collectivités locales, l’Assemblée a voté une enveloppe de 300 millions d'euros, rallongée de 450 millions supplémentaires par le Sénat, soit un total de 750 millions d'euros pour aider les collectivités locales à faire face aux différentes hausses de dépenses induites par les mesures des projets de loi pour le pouvoir d’achat et du PLFR.
En effet, si l’Assemblée nationale avait, en première lecture, réclamé 120 millions d’euros pour aider les départements à faire face à la hausse de 4 % du revenu de solidarité active (RSA), et 180 millions pour l’augmentation du point d’indice des fonctionnaires, les élus de la Haute Assemblée ont obtenu 450 millions supplémentaires grâce à qui le montant de la dotation sera porté à 70% de la hausse des dépenses constatées en 2022 pour compenser la l’envolée des dépenses d'approvisionnement en Energie, électricité́ et chauffage urbain, ainsi que de la hausse des dépenses alimentaires (approvisionnement des cantines scolaires et administratives). Au total, ce sont 22 000 communes qui pourront bénéficier de cette compensation. Comme le précise Sylvie Vermeillet, sénatrice du Jura « Nous avons proposé des mesures pour soutenir les territoires et protéger le pouvoir d’achat des Français tout en étant attentif à contenir la dette publique ».
Quant aux Régions qui doivent, elles, faire face aux dépenses de formation professionnelle, elles recevront une compensation partielle. En effet, le gouvernement a décidé la mise en place d’un prélèvement sur recettes (PSR), pour compenser la revalorisation des stagiaires de la formation professionnelle, de 18 millions d'euros en 2022.
Vigilance, le mot d’ordre des élus
Reste que les élus qui soulignent que le dégel du point d’indice, l’envolée de l’inflation et les autres dépenses supplémentaires liées au contexte économique et géopolitique ne peuvent être déconnectées de la question des finances locales et regrettent une véritable concertation avec l’Etat. Ils souhaiteraient la mise en place d’une grande conférence territorialisée.
D’ailleurs, François Sauvadet, Président de Départements de France a lui aussi plaidé pour l’ouverture d’un cadre de discussion sur les finances locales lors de sa rencontre avec la Première Ministre Elisabeth Borne en août dernier. Et il a indiqué que « les collectivités représentent 70 % de l’investissement public et 9 % de l’endettement du pays et qu’il convient de « prendre garde à ne pas faire peser sur elles une contribution excessive à l’effort national d’assainissement des finances publiques, pour ne pas ajouter une crise à la crise, en faisant de l’investissement, une variable d’ajustement ».
Danièle Licata
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