L'absentéisme en hausse chez les fonctionnaires territoriaux

Finances locales
07 mars 2019

RESSOURCES HUMAINES. Si les causes du surabsentéisme sont multiples, les enjeux en matière de santé au travail sont plus que jamais au coeur des préoccupations pour maintenir la qualité des services rendus à la collectivité.

Plusieurs études récentes en témoignent : le taux d'absentéisme dans les collectivités territoriales progresse un peu plus chaque année : + 3 % en un an, + 5 % en deux ans et + 33 % en dix ans, pour s'établir à 9,8 % en 2017 (9,2 % hors congé maternité), selon l'étude Sofaxis, spécialisée dans l'assurance et la prévention des risques auprès des employeurs territoriaux et hospitaliers (Regard sur les premières tendances 2017 des absences pour raison de santé). Ce qui représente 39 jours par arrêt, toutes natures d'absences confondues, en hausse de près de 15% en dix ans. En 2017, ce sont plus de 70 arrêts qui sont survenus pour un effectif de 100 agents employés. Et c'est la « maladie ordinaire » qui comptabilise à elle seule près de la moitié de l'ensemble des arrêts soit l'équivalent de près de 10 agents absents tout au long de l'année sur 100 employés.

UN COÛT EXORBITANT
En 2017, les absences auront représenté pour l'employeur public un coût direct de 2 112 € par agent titulaire en collectivité territoriale. « Reste que l'impact économique des absences n'est pas réductible aux seuls coûts directs pour l'employeur. Si les arrêts courts pèsent plus faiblement sur le coût global direct, leur répétition et leur imprévisibilité désorganisent les activités et se trouvent en cela générateurs de coûts induits bien supérieurs aux coûts directs », avertissent les auteurs de l'étude. En effet, le report de la charge de travail de l'agent absent sur le reste de l'équipe constitue à lui seul un coût indirect des arrêts. La nécessité d'absorber une charge de travail supplémentaire peut alors augmenter les risques d'accidents du travail, produire de la fatigue supplémentaire et de l'insatisfaction pour les agents présents, aboutissant à plus ou moins long terme à de nouveaux arrêts. « On comprend pourquoi, les enjeux en matière de santé au travail sont plus que jamais au coeur des préoccupations des directeurs des ressources humaines. Car l'absentéisme n'est que la partie visible de l'iceberg. En dessous, on dénombre bon nombre de problèmes - reconnaissance, incivilités, mauvaise organisation - qui concourent à la dégradation des conditions de travail », commente Éric Goata, directeur général du cabinet Eléas. Or pour maintenir la qualité des services publics dans un contexte budgétaire contraint, il faut agir vite. Au coeur des enjeux de performance du secteur public, les ressources humaines. « Pour bien comprendre les dynamiques d'absences, il faut investir dans la gestion RH. En d'autres termes, il faut créer les conditions de réalisation de services de qualité, performants et soutenables à long terme, instaurer un dialogue social constructif et prendre en compte la qualité de vie au travail pour donner aux agents territoriaux les moyens et l'envie de s'engager dans des défis de performance », analyse Philippe Rodet, médecin urgentiste et spécialiste de la qualité de vie au travail.

QUALITÉ DE VIE AU TRAVAIL ET ABSENCES
C'est prouvé, le manque de clarté des consignes ou la mauvaise compréhension des missions sont des facteurs de risques d'absentéisme. « Et dans la conjoncture actuelle de changement, la stabilité du travail revêt d'autant plus d'importance pour les agents », font remarquer les aurépétition.teurs qui, pour aller encore plus loin ont croisé plusieurs enquêtes récentes sur la qualité de vie au travail en collectivité avec les indicateurs de mesure des absences. Principaux enseignements ? La proportion d'agents absents est surtout influencée par les pressions psychologiques et les tensions vécues. « C'est très clairement des situations que vivent les agents hospitaliers. L'exigence émotionnelle peut être plus ou moins importante, la pression qui s'exerce alors sur eux peut conduire à des arrêts de travail quand ils se retrouvent débordés », fait remarquer Philippe Rodet. Une communication de mauvaise qualité, tout comme le fait d'être fréquemment interrompu dans son travail peuvent entraîner également des arrêts de travail àaurépétition. « Par exemple, les interrogations ou inquiétudes que génèrent les transformations engagées au sein de la fonction publique territoriale apparaissent comme des facteurs potentiels d'absence », analysent les auteurs. La question de la reconnaissance au travail s'affiche aussi comme facteur de risque. Et la présence ou non de soutien dans le travail influe sur les durées d'absence. Ainsi, lorsque interrogés sur les douleurs qu'ils ressentent au travail, ils sont nombreux à dire qu'ils les ressentent de manière plus importante dans des situations d'absence de cadre de travail ou de management considéré comme déficient. « Autant de raisons qui plaident pour un accompagnement des manageurs, pour les aider à guider, à apporter du soutien et à valoriser le travail de leurs agents. Car on le sait, les bonnes pratiques managériales apportent un sentiment de satisfaction qui peut alors agir positivement sur les phénomènes d'absences au travail », concluent les auteurs.

 

©Philippe Dureuil

TROIS QUESTIONS À : ÉRIC GOATA directeur général du cabinet Eléas

Comment expliquez-vous cet absentéisme dans la fonction publique territoriale ?
Éric Goata : Le taux d'absentéisme est la partie visible de l'iceberg qui illustre la dégradation de la qualité de vie au travail. Il est la manifestation d'un certain nombre de problèmes qui souvent se cumulent et qui dégradent dangereusement les conditions de travail. Et les mauvaises conditions de travail ont des répercussions directes sur la santé des agents.

Comment expliquez-vous cette dégradation des conditions de travail ?
É. G. : Elle est le résultat d'un ensemble de facteurs : surcharge de travail, manque d'autonomie, mais elle est aussi due aux grands chantiers de modernisation dans la fonction publique qui induisent de nouvelles façons de travailler déstabilisantes pour beaucoup d'agents, surtout si aucune formation n'a été prévue en amont.

Et le management dans tout ça ?
É. G. : Expliquer l'absentéisme par un manque de management est réducteur, même si le manque de cadrage entraîne une dégradation du sentiment d'appartenance, première cause du désengagement. C'est pourquoi, il est nécessaire d'accompagner les managers pour les aider à basculer vers un autre mode de management plus collaboratif, plus autonome, associant davantage leurs agents aux résultats.

Danièle Licata

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Question :
Un maire, donc OPJ, peut-il l’être en dehors de sa commune ?
Réponses :
Non, il est élu OPJ sur sa commune.
Tous les pouvoirs du Maire en tant que représentant de l'Etat ne lui sont octroyés que sur son territoire.
Non uniquement dans la commune où il est élu maire.

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