Les inondations survenues en octobre 2018 dans le Sud montrent qu'il est important d'agir en amont pour réduire l'impact des crues et inondations, car « aucun territoire n'est invulnérable », rappelle Noël Faucher, maire de Noirmoutier-en-l'Île (85) et président du Centre européen de prévention de risque d'inondation (Cepri). Entretien.
Quelles sont les mesures à mettre en place par les communes les plus vulnérables pour se prémunir contre les crues, les inondations ou submersions marines ?
Noël Faucher : Il est de notre responsabilité de mettre en place un certain nombre d'actions, la plus urgente étant l'installation d'un plan communal de sauvegarde. C'est un enjeu majeur pour préparer les élus et faire prendre conscience aux citoyens qu'ils vivent sur un territoire porteur de situations potentiellement délicates, voire dangereuses.
Le risque zéro n'existe pas. Concrètement, outre les mesures de réduction de la vulnérabilité du bâti et la réalisation d'ouvrages de défense ad hoc, les communes doivent envisager une stratégie globale de gestion du risque d'inondation (SLGRI). L'objectif étant d'éviter au maximum les dommages sur les personnes et les biens, et d'assurer la résilience du territoire. Par ailleurs, il est absolument nécessaire de bâtir et entretenir une véritable culture associée à ce risque.
Existe-t-il des outils technologiques efficaces pour prévenir et limiter l'impact des inondations ?
N.F. : La technologie se met au service d'un certain nombre de domaines comme la sensibilisation, la prévision et l'alerte. Elle nous accompagne sur l'acquisition de connaissances, au moment de la crise principalement, ou pour la surveillance des ouvrages avec notamment l'utilisation de drones.
Les outils prédictifs, eux, se développent et s'affinent au fur et à mesure des retours d'expériences. Ils sont utiles pour étudier, par exemple, le phénomène des crues rapides. Cependant, ces outils ne peuvent régler à eux seuls la question du risque d'inondation.
Nous devons travailler sur les plans de prévention des risques pour limiter l'urbanisation et les constructions sur des territoires porteurs d'un risque important. Il existe des exemples d'aménagements urbains qui, aujourd'hui, veillent à réduire au maximum l'impact d'une submersion marine ou d'une inondation en gérant les écoulements d'eau. Ceci est possible dès lors que la question du risque est placée, en amont, au coeur des réflexions et des actions.
Les maires sont-ils suffisamment sensibilisés à ces risques?
N.F. : Les élus ne sont pas des professionnels de la gestion de crise. Ils ont besoin d'une vraie formation pour apprendre à gérer de telles situations. En période de crise, il faut aller très vite pour ne pas rajouter de l'anxiété et de l'énervement à une situation déjà dramatique.
La formation passe également par la sensibilisation. Il s'agit de prendre conscience qu'aucun territoire n'est invulnérable et que l'on peut subir une crise plus sereinement dès lors que l'on s'y prépare. Cela implique de travailler aussi la résilience. Humilité, responsabilité et formation permanente sont nécessaires. C'est le rôle de structures spécialisées comme la nôtre, le Cepri, d'accompagner les élus sur ces questions. Nous publions des guides pratiques pour leur permettre d'approfondir leurs connaissances.
Depuis le 10 octobre 2018, vous êtes à la tête du Cepri. Quelles seront les actions prioritaires de votre mandat?
N.F. : Nous allons poursuivre ce travail qui consiste à transmettre à l'ensemble des acteurs publics la culture du risque.
Notre deuxième axe de travail concerne la sensibilisation des services de l'État qui doivent prendre conscience de la rupture entre d'un côté la nécessité de s'adapter et de l'autre la rigidité réglementaire.
Les questions du financement de ces politiques de prévention sont aussi au coeur de nos réflexions. Il est de notre responsabilité, en tant que structure fédératrice, de porter ce discours et faire en sorte que nous puissions oeuvrer ensemble pour agir le mieux possible. Nous devons être un acteur de toutes les réflexions et toutes les actions qui contribuent à réduire notre vulnérabilité face aux questions du réchauffement climatique. Le rôle du Cepri est de montrer à l'État qu'il a raison de faire confiance aux élus locaux. Nous sommes responsables. La commune est l'échelon le plus efficace pour agir et doit se voir dotée de la compétence et des moyens pour le faire. C'est au plus près du territoire que l'on peut gérer le risque efficacement. Le premier acteur du risque, c'est le maire.
Propos recueillis par Blandine Klaas
PRÉVISION ET ANTICIPATION
Publié par le Cepri, le guide Prévision et anticipation des crues et inondations rappelle le cadre national de la prévision, de la vigilance météorologique et de la vigilance crues en France métropolitaine et outre-mer. Il décrit les derniers outils développés par Météo-France et le Service central d'hydrométéorologie et d'appui à la prévision des inondations (Schapi) en la matière, puis évoque différentes expériences conduites au niveau local par des collectivités territoriales. Enfin, il recommande à ces dernières comment exploiter au mieux les outils existants de prévision hydrométéorologiques et de surveillance des phénomènes susceptibles de générer des inondations sur leur territoire. www.cepri.net
À RETENIR
LE RISQUE D'INONDATION est le premier risque naturel en France.
17 MILLIONS peuvent être concernées par des débordements et 1,4 million par des submersions marines.
19 SERVICES de prévision des crues (SPC) sont répartis sur le territoire de la métropole continentale.
Source: Cepri.
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